La Croix-Rouge française a ouvert une délégation à Port-Vila, la capitale du Vanuatu, en juin 2007. Aux côtés de la Croix-Rouge du Vanuatu, elle a mené des activités centrées principalement sur la réduction des risques de catastrophes et la réduction de l’impact du changement climatique. Des projets qui ont une résonnance particulière après le passage du cyclone Pam, dans la nuit du 13 au 14 mars derniers. Charles Aurouet, responsable de ces projets au Vanuatu de 2012 à 2014, nous en explique les enjeux et objectifs.

Etes-vous surpris par la force du cyclone PAM ? 

Ce cyclone, qui a atteint jusqu’à 320 km/heure, a été d’une intensité exceptionnelle. Depuis des années, les experts en météorologie du Pacifique prédisent des cyclones de moins en moins fréquents mais de plus en plus violents, en raison du changement climatique. Le cyclone PAM semble confirmer ces craintes. 

Le Vanuatu est considéré comme l’un des pays les plus à risques au monde. Pour quelles raisons ?

En plus des dégâts matériels considérables qu’il a provoqués, le cyclone PAM a détruit une partie des cultures, ce qui va accentuer davantage la situation d’insécurité alimentaire qui préexistait, notamment sur l’île de Tanna, située sur la trajectoire du cyclone. Le Vanuatu est l’un des pays les plus pauvres au monde et est en outre exposé à de nombreuses catastrophes naturelles : séismes, tsunamis, inondations, glissements de terrain, activités volcaniques et cyclones. Les vulnérabilités sont donc multiples, renforcées par le caractère insulaire et les difficultés d’accès aux îles et aux communautés, très dispersées. Pour toutes ces raisons, notre mission de secours aux populations affectées par le cyclone PAM va être longue et complexe.

Quels sont les projets menés par la Croix-Rouge française au Vanuatu ?

La Croix-Rouge française est arrivée au Vanuatu en 2007 avec pour mission de renforcer les capacités de la Croix-Rouge et de la soutenir dans son développement. Elle s’est engagée dans des programmes de réduction des risques de catastrophes (RRC) et d’adaptation au changement climatique menés avec la participation active des communautés. Ces thématiques transversales ont pour objectif commun de renforcer la résilience des populations et s’appliquent à différents secteurs. La Croix-Rouge française travaille essentiellement sur quatre volets : l’eau, l’hygiène et l’assainissement ; la sécurité alimentaire ; la sensibilisation aux risques et effets du changement climatique et phénomènes climatiques El niño et niña ; l’abri, le renforcement des centres d’évacuation et des télécommunications. 

Comment juger l’impact de ces projets face à des catastrophes de l’ampleur de Pam ? 

Le cyclone a peu affecté le nord de l’archipel, où nous intervenons. Néanmoins, la Croix-Rouge française a participé à l’effort national de lutte contre les catastrophes naturelles et les effets du changement climatique, en consortium avec six autres organisations humanitaires internationales. Nous sommes tous convaincus des bénéfices tirés de ce travail avec les communautés. Nous avons par exemple effectué de nombreux exercices de simulation de catastrophes – inondations, cyclones, tsunamis, etc. – à l’échelon local, provincial ou national, afin de former la population aux bonnes pratiques. Les gens reçoivent les alertes et disposent des informations nécessaires pour savoir comment réagir et se protéger. Ils savent qu’il faut emmener avec eux leurs papiers importants, de la nourriture et leurs effets personnels avant d’aller se réfugier dans des lieux sûrs, que nous avons identifiés au préalable avec les autorités et les communautés. Nous avons travaillé sur une cartographie des zones d’évacuation selon chaque type de catastrophe. Et puis, la Croix-Rouge française a collaboré à la réalisation d’outils de communication pédagogiques, dont un consacré à la construction et au renforcement des maisons. Tous ces enseignements contribuent assurément à préparer la population aux catastrophes et à réduire leur vulnérabilité.

En quoi les projets menés dans les secteurs de l’eau, de l’hygiène et de l’assainissement contribuent-ils à réduire les vulnérabilités?

De manière générale, le Vanuatu manque d’eau. La population est donc très dépendante de l’eau de pluie. La Croix-Rouge française a construit des réseaux d’eau destinés à diversifier les ressources en eau et parer aux sécheresses d’une part, et à mieux anticiper les effets du changement climatiques (contamination des eaux souterraines dans le cas d’une montée des eaux) d'autre part. La Croix-Rouge française a également formé les communautés à l’entretien de ces installations et à leur bonne utilisation pour éviter le gaspillage et la surexploitation de la ressource. Elle a d’ailleurs participé à des campagnes de sensibilisation et de promotion de l’hygiène avec le ministère de la Santé du Vanuatu sur les comportements et les bonnes pratiques à adopter afin de contribuer à la réduction des épidémies de dengue et de malaria (protection des points d’eau, moustiquaires, etc.). 

A quelques mois de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 21) qui se tiendra à Paris, cette catastrophe au Vanuatu semble avoir déclenché une prise de conscience collective sur la nécessité de renforcer la lutte contre les  effets dévastateurs du réchauffement climatique.

Oui, le président de l’archipel a d’ailleurs lancé un appel à la communauté internationale à Sendaï, au Japon, en marge d’une conférence de l’ONU sur la prévention des catastrophes naturelles. Le Président de la République française, François Hollande, a lui aussi évoqué " un nouveau cri d'alarme pour que la communauté internationale prenne toutes ses responsabilités dans la lutte contre le changement climatique". La Croix-Rouge française - comme le Mouvement international Croix-Rouge dans son ensemble - est très investie sur cette thématique à travers ses programmes de réduction des risques et de préparation aux catastrophes. Une réunion préparatoire de la COP 21 est d’ailleurs prévue fin mars avec la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et le centre climatique Croix-Rouge et Croissant-Rouge, avec lequel la Croix-Rouge française a collaboré au Vanuatu sur le programme adaptation au changement climatique. Malheureusement, ce programme a dû être interrompu fin décembre, faute de financements…

Propos recueillis par Géraldine Drot

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