TROIS QUESTIONS À FLORENT VALLÉE, RESPONSABLE DES OPÉRATIONS EN FRANCE DE LA CROIX-ROUGE FRANÇAISE

VOUS GÉREZ DEPUIS LE SÉISME EN HAÏTI, L’ACCUEIL DES ENFANTS EN COURS DE PROCÉDURE D’ADOPTION. QUEL EST LE PARCOURS DES ENFANTS DEPUIS HAÏTI ?

Florent Vallée : « Les enfants sur le point d’être adoptés sont d’abord regroupés par l’ambassade de France. Ils sont ensuite transférés, à Fort-de-France ou Pointe-à-Pitre, sur des vols militaires et pris en charge par un dispositif comprenant des bénévoles de la Croix-Rouge, des médecins de la Cellule d’Urgence Médico-Psychologique (CUMP) et des associations partenaires, comme le Secours Catholique.   Il arrive que certains enfants soient hospitalisés, mais ils patientent généralement moins de 24 heures aux Antilles avant d’embarquer sur des vols commerciaux à destination de Paris, avec des accompagnateurs spécialisés. Les parents ne sont prévenus que lorsque les enfants sont dans l’avion pour Paris afin d’éviter toutes les déceptions. »

COMMENT S’ORGANISE L’ACCUEIL DES ENFANTS À LEUR ARRIVÉE EN FRANCE ?

F.V : « Lorsqu’ils descendent de l’avion, ils intègrent une zone fermée, où les attendent les bénévoles de la Croix-Rouge française et des psychologues. Notre principe est ‘une paire de bras pour chaque enfant’. Chaque volontaire a donc un dossard avec un numéro correspondant à un enfant, dont il sera le référent exclusif en attendant que ses parents le récupèrent. C’est d’ailleurs une chose qu’ils n’ont encore jamais eu pour la plupart.   La procédure administrative pour les parents est assez longue et prend généralement 3 à 4 heures. Pendant ce laps de temps, l’objectif pour nos bénévoles est de faire en sorte que tout se passe bien pour l’enfant et qu’il ne soit jamais perdu. Nous fournissons des jouets, des tapis de sol, des biberons ou de la nourriture et un nounours rouge Croix-Rouge pour chacun d’entre eux. Il s’agit d’une logistique importante : à titre d’exemple, pour 60 enfants - notre plus grosse arrivée - nous avons mobilisé 80 volontaires.   En parallèle, nous accueillons aussi les parents, qui sont situés dans une autre pièce et qui attendent, au minimum, 1h30. Il s’agit d’instaurer un moment de parole et leur permettre de s’exprimer car ils vivent un moment très important.   Finalement, après les différentes étapes administratives, les parents accèdent à la « zone d’échange », où ils vont pouvoir retrouver leurs enfants. Ce sont nos bénévoles référents, accompagnés par un policier, qui opèrent cette transmission et là encore, ce sont des moments très forts en émotion. Ils se découvrent pendant tout le temps qui leur est nécessaire et peuvent alors rentrer chez eux. »

QUELLE EST LA SUITE DES OPÉRATIONS ?

F.V : « Nous travaillons sur demande du Ministère des Affaires Etrangères français. De fait, depuis le 22 janvier, nous avons pu rapatrier 363 enfants, grâce au travail de 992 volontaires de 14 départements différents, qui ont effectué 6800 heures de bénévolat.   Nous allons, bien sûr, rester mobilisés tout le temps de cette crise. Le rôle de la Croix-Rouge française, à ce niveau, est d’humaniser la chaîne de transfert des enfants et de faire en sorte que cet épisode soit le moins traumatisant possible. Nous devons être présents à tous les niveaux pour les enfants. C’est exactement ce qui fait la force de notre emblème et de nos principes. »

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