Alors que s’achèvent à peine les opérations de secours liées à la catastrophe de Fréjus (décembre 1959), c’est vers le Maroc que vont désormais se concentrer les efforts de la Croix-Rouge française. Le 29 février 1960 à 23h40, la ville d’Agadir, est secouée par un séisme d’une magnitude de 5,7 sur l’échelle de Richter.

La première urgence : l’accueil et les soins

Dés 6h du matin, la délégation générale de la Croix-Rouge française au Maroc mobilise les secours et les infirmières de son école à Casablanca. La Croix-Rouge est touchée : le bâtiment de la délégation générale s’est effondré, une seule des trois infirmières que l’on retrouve sous les décombres est en vie.

Sans délai, les communications sont établies avec les autorités locales et militaires, le Croissant-Rouge et le siège à Paris pour définir les conditions d’intervention. La Croix-Rouge française aura pour missions l’information et le soutien des familles, l’aide à l’enfance, la fourniture de lait et de vêtements et les soins infirmiers.

A 11h, les deux premiers avions décollent de Paris avec deux équipes de secours, du matériel d’urgence, du lait et des couvertures à destination de la base aéronavale d’Agadir, où un pont aérien a été mis en place. Les rescapés y sont regroupés et soignés. Durant 4 jours, ils affluent, 50 infirmières sont activent jours et nuit auprès d’eux.

En ville, secouristes et ambulancières assistent les marins dans la recherche et le dégagement des victimes restées dans les ruines. Ils trouvent souvent des corps sans vie. Les blessés sont évacués par avions militaires sur tous les hôpitaux du Maroc. Leur nombre est tel que les locaux sont insuffisants, ils sont installés sur 600m prés de l’ère d’atterrissage.

L’identification des corps par l’armée est quasiment impossible : surpris en pleine nuit, les victimes sont en pyjama, ne portent aucune pièce d’identité. Le bilan est lourd : 25 000 blessés et rescapés, 54 enfants orphelins, 12 à 15 000 morts. Par crainte d’une épidémie, les morts sont très vite inhumés dans une fosse commune.

Rechercher les disparus, soutenir les familles, accueillir les rescapés

Dès le 2 mars, le bureau la Croix-Rouge est assailli par les rescapés, à la recherche des leurs. On établit pour les afficher les listes des vivants, également transmises par telex en France, d’où les demandes de nouvelles sont incessantes. En 8 jours, 1500 messages sont transmis aux familles angoissées.

Il faut soutenir aussi les rescapés physiquement indemnes. Désorientés, certains refusent de retourner vivre dans leur maison encore debout. D’autres ont tout perdu.

Les rescapés sont évacués vers Rabat, Casablanca et Marrakech, la Croix-Rouge y organise les soins avec les équipes du Croissant-Rouge. Enfin, sur demande de l’ambassade de France, la maison de convalescence de la CR à Salé est transformée en centre d’hébergement avec l’aide des mouvements de jeunesse locaux. Ce centre accueillera plus de 6000 personnes en 4 mois. Il faut enfin parer au ravitaillement, distribuer des vivres, de l’eau, des vêtements.

Les secours

La solidarité est totale, les équipes travaillent en parfaite coordination avec le Croissant-Rouge, les autorités marocaines, l’armée française, l’ambassade de France.

L’aéroport d’Agadir devient la plaque tournante des secours internationaux. Les avions arrivent de Norvège, de Russie, de Suède ou d’Espagne.

Outre les équipes sur place, ce sont des vivres, des couvertures, des tentes, de l’argent qui sont envoyés. De partout en France, d’autant plus touchée qu’une importante communauté française vit encore au Maroc, les dons affluent vers les conseils départementaux de l’association. L’appel au réseau a bien fonctionné : 50 000 nouveaux francs ont été recueillis, 50 000 autres donnés par le général De Gaulle. Les dons en nature, denrées et médicaments, collectés par les conseils départementaux, sont acheminés via Bordeaux et Marignane. Lorsque, le 3 mars le délégué à Casablanca demande des vêtements pour 500 personnes, 1300 kg de vêtements partent du Bourget en quelques heures.

L’accueil des ressortissants français

C’est justement au Bourget, ce même jour à 17h, que se posent les premiers avions de Français rapatriés. Jusqu’au dernier, ils vont être accueillis jour et nuit par les bénévoles de la Croix-Rouge qui leur fournissent vêtements, nourriture, produits d’hygiène. Ils seront guidés dans leurs démarches par les secouristes de la Seine aux aéroports du Bourget et d’Orly, par ceux de Marseille à l’aéroport d’Istres, par ceux de Bordeaux. Selon leur destination (beaucoup iront en Bretagne), ils seront accueillis et accompagnés par les comités locaux.

Malgré sa faible magnitude, ce séisme reste le plus meurtrier de l’histoire du Maroc. Si une grande incertitude subsiste quant au bilan humain du désastre, on estime que 12 à 15 000 personnes y ont perdu la vie, soit un tiers de la population d’Agadir.

Virginie Alauzet