Du dispositif ARAMIS au plan de préparation aux nouvelles menaces (PPNM).

Les événements de novembre 2015 ont ouvert un nouveau chapitre dans la culture secouriste de la Croix-Rouge française, confrontée à des attaques multiples (voire simultanées), mobiles, multimodales, avec des armes de guerre.

Ces paramètres ont bouleversé les modes opératoires, d’où la nécessité d’anticiper et de nous préparer. Le Plan de préparation aux nouvelles menaces (PPNM), élaboré par la direction de l’urgence et du secourisme en 2015 répond à cette double exigence : être en capacité de répondre à d’éventuelles attaques sur tout le territoire et renforcer la protection des secouristes. 

Les explications d’Alain Rissetto, directeur-adjoint de l’urgence et du secourisme à la Croix-Rouge française.

Depuis quand la Croix-Rouge française dispose-telle d'un dispositif attentats ? Et comment construit-on un dispositif attentats? 

La Croix-Rouge française est engagée en Ile-de-France dans le prompt secours depuis plus de quarante ans. Chaque catastrophe de grande ampleur, et qui plus est un attentat, engendre naturellement des interrogations, une remise en question de nos modes opératoires. Nous tirons des leçons de chaque événement, c’est d’ailleurs ce qui nous rend plus efficaces et nous fait avancer.

Le plan « ARAMIS » sous sa forme actuelle est ainsi né d’une réflexion amorcée après une série d’attentats majeurs: ceux du 11 septembre 2001, tout d’abord, contre le World Trade Center à Manhattan. Les États-Unis ferment immédiatement leur espace aérien. Conséquence: des milliers de voyageurs se retrouvent bloqués à Roissy. Il s’agit d’un des effets collatéraux inattendus, imprévisibles, que nous devons gérer au pied levé. Deux événements décisifs surviennent quelques années plus tard: le 11 mars 2004, sept bombes explosent dans plusieurs trains en gare d’Atocha à Madrid, trois autres dans des gares de banlieue. Puis, le 7 juillet 2005 à Londres, quatre explosions simultanées se produisent dans le métro et un bus, perpétrées par des kamikazes. Nous nous sommes alors posé légitimement cette question: et si cela arrivait à Paris ? Que ferions-nous en cas d’attaques coordonnées sur plusieurs sites ? Serions-nous en mesure de répondre à plusieurs situations d’urgence en même temps, sans oublier les risques concomitants de sur-événement ou de sur-accident? Arrêt des transports en commun, coupure des moyens de télécommunications, etc. Le plan ARAMIS Ile-de-France s’est donc imposé. Et l’année 2015 est arrivée…

Pourquoi avoir mis en œuvre un PPNM?

Imaginez que les attentats du 13 novembre 2015 aient eu lieu dans une autre ville de province ? Aurions-nous été en capacité de répondre à des événements d’une même ampleur ?

Je crains que non, car il n’y a pas la même culture opérationnelle qu’en Ile-de-France, ni les mêmes moyens. Nous avons donc pris la décision de transposer le plan « ARAMIS » dans douze grandes métropoles, plus Lens et Saint-Etienne qui accueillaient l’Euro 2016. Notre objectif est d’adapter les principes du plan francilien en province et de développer cette culture du risque à l’échelle des départements. Il s’agit désormais d’inclure le plan « ARAMIS » dans les plans d’urgence départementaux. 

Quelles sont les principales évolutions prévues par le PPNM?

Le PPNM s’appuie sur trois principes: je m’organise, je me forme et je me protège. Nous avons envisagé des schémas opérationnels fluides et adaptables, qui limitent au maximum l’exposition des bénévoles aux risques inévitables de telles opérations. Nous privilégions, par exemple, un compartimentage des zones d’intervention, selon le degré de danger potentiel. Le volet formation s’adresse en priorité aux secouristes, car ce sont les premiers engagés sur le terrain. Nous avons élaboré un module de 2 heures dans le cadre de la formation continue obligatoire, qui présente les nouvelles menaces, les moyens de protection et les missions concernées.

Dans un second temps, ce module pourra être adapté aux bénévoles et aux salariés d’établissements. Un deuxième module obligatoire concerne les chefs d’intervention qui dirigent des équipes sur des situations d’urgence. En outre, parmi les évolutions retenues, il a été acté le fait de se doter de matériels de protection spécifiques. Comme le nom l’indique, il s’agit de fuir une zone contaminée, non d’y pénétrer. Tout est donc centré sur la sécurité renforcée des intervenants, qui est la condition sine qua non d’une prestation de qualité. Ne l’oublions pas, le risque zéro n’existe pas.

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