L’association PREAUT a été fondée en 1998 par des professionnels praticiens de l’autisme dans le but de conduire une recherche sur l’identification, au cours des deux premières années de la vie, des troubles de la communication pouvant présager d’un risque autistique.

Même si le diagnostic ne peut être posé de façon sûre avant l’âge de 3 ans, une détection précoce du risque permet de déclencher plus tôt une prise en charge adaptée de l’enfant. C’est dans ce cadre qu’a été créée à Paris l’Unité d’Accompagnement PREAUT (UDAP) en janvier 2010, devenue le 1er janvier 2012 un établissement de la Croix-Rouge française.

Lorsqu’une famille est adressée à l’UDAP, c’est souvent avec des attentes précises. Dès le premier entretien, un projet personnalisé est défini à partir de l’évaluation de l’enfant ou adolescent, pour décider des modalités de sa prise en charge. Sortir de chez soi, prendre les transports en commun,  commander un café, se mêler à un groupe… Tout, dans le quotidien, peut être source d’angoisses. Les équipes mobiles de l’UDAP, constituées de psychologues cliniciennes encadrant des étudiants en fin de cursus de psychologie (master ou Licence Pro), introduisent, en « maillant » les soins existants,  des actions d’intégration sociale et scolaire adaptées aux besoins de l’enfant/adolescent et aux souhaits des familles. Des collaborations sont déjà engagées, au sein de la Croix-Rouge, avec l’hôpital de jour l’Etincelle et le CMPP La passerelle. Elles s’étendront ensuite aux structures d’accueil petite enfance ayant la possibilité d’intégrer ces enfants.

L’objectif est d’aider l’enfant/adolescent à se construire harmonieusement et à s’autonomiser dans son environnement. « En trois ans, j’ai vu tous les enfants progresser », explique Emeline Ruiz, responsable de la coordination des psychologues. « Il_s _sont moins angoissés, moins agités, parviennent à entrer dans la communication, adressent des gestes affectueux… ».  Les progrès se vérifient à tous ces signes, parfois subtils. L’accompagnement des familles va de pair, que ce soit dans les démarches administratives ou dans leur quotidien, pour leur permettre de souffler un peu. L’UDAP les soutient « dans leur rôle de parents, tente d’établir avec eux une véritable alliance thérapeutique », précise Elisabeth Sitbon, la directrice de l’établissement. 

Des prises en charge intégratives 

Chaque étudiant en formation prend en charge un ou deux enfants pour la durée de l’année scolaire. Les interventions sont en moyenne de 5 heures par semaine, réparties sur deux ou trois séances.  Les prises en charge sont adaptées au niveau de développement et au profil de chaque enfant, afin qu’il apprenne à se repérer dans l’espace et le temps, à développer des capacités de communication, qu’il prenne conscience de son corps, gère ses affects et ses émotions. « Nous défendons comme indispensable la diversité des formes de prises en charge, et la liberté des familles à les choisir », affirme Graciela C. Crespin dans son ouvrage, « Traitements des troubles du spectre autistique : à la recherche d’un modèle français » (Erès). Responsable scientifique de l’UDAP et Chargée de la coordination de la recherche PREAUT sur le dépistage précoce des troubles autistiques, elle s’insurge contre la recommandation récente de la Haute Autorité de Santé qui tend à exclure la psychanalyse au profit exclusif de l’approche comportementale.

Place à la recherche

Sous la double impulsion de Graciela C. Crespin et d’Annick Hubert Barthélémy, conceptrice du projet, une dizaine de classes expérimentales spécifiquement destinées aux enfants porteurs de troubles du spectre autistique, vont être mises en place dans des institutions du secteur sanitaire et médicosocial, dont deux gérées par la Croix-Rouge française. La pertinence de cette démarche sera évaluée dans le cadre d’une recherche-action sur trois ans, promue par PREAUT et portée par la Croix Rouge française. « Ce programme entre dans le cadre rigoureux de la recherche biomédicale, c’est une première expérience pour notre association qui fait de la recherche l’un de ses axes stratégiques », explique Myriam Garing, directrice de la filière métier handicap de la Croix-Rouge française en Ile-de-France. D’ores et déjà, des groupes de travail se réunissent tous les deux mois environ, permettant à des directeurs d’établissement et des spécialistes de l’autisme d’échanger, de partager leurs expériences, leurs compétences, pour tenter d’avancer. « Les incertitudes qui demeurent, la pluralité des formes d’autisme – on devrait d’ailleurs parler d’autismes au pluriel - devraient être aujourd’hui considérées comme une chance pour la recherche, estime Thierry Cabrita, directeur de la filière handicap à la Croix-Rouge française, ouvrir des portes sur des dispositifs innovants, au lieu de s’enfermer dans des écoles de pensée. » 

Pour aller plus loin

L’UDAP- Croix-Rouge française lancera d’ici quelques mois un projet expérimental destiné à accompagner des enfants dits « sans solution ». Ce dispositif financé par la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH), en partenariat avec le Conseil général du Val d’Oise et l’hôpital de Pontoise, concerne 15 enfants dans l’attente d’une prise en charge adaptée à leurs difficultés. Un réseau UDAP-bébés est par ailleurs en cours de conception, en partenariat avec le service de pédopsychiatrie de l’hôpital Necker à Paris, visant à soutenir les parents dans leur organisation et leurs choix, dès les premières évaluations diagnostiques. Ce projet sera présenté dans le cadre du troisième Plan Autisme du gouvernement et répond aux préconisations de la Haute Autorité de Santé. Enfin, un projet de jardin d’enfants alternatif et polyvalent est à l’étude, visant à favoriser à la fois l’intégration scolaire d’enfants atteints de troubles autistiques et la formation de professionnels de l’accompagnement.  Dans ce but, une convention sera proposée à l’Education nationale.

Géraldine Drot