" La Fabrique des sens " en tournée

« Aujourd’hui, c’est le ‘pectacle’ ! » A trois ans, Meissa a encore un peu de mal à dire « spectacle » comme la plupart de ses camarades qui ont entre 10 semaines et 4 ans. Ce mercredi 3 novembre, la compagnie de théâtre parisienne « Poudre de sourire » a posé ses valises et son décor au multi-accueil « l’Arc en ciel » à Forbach, en Moselle. Au programme, « Boucle d’or et les trois ours », un spectacle de marionnettes inspiré d’un conte qui raconte la quête d’identité d’une petite fille, en insistant sur l’utilisation des cinq sens et sur la notion de temps et d’espace.

Ils sont une vingtaine d’enfants devant la scène installée dans la salle de jeu de cette structure de la petite enfance. Durant 45 minutes, les enfants sont subjugués par ce qu’ils découvrent. Il faut dire que pour la grande majorité d’entre eux, ce spectacle est leur premier contact avec le théâtre. « Cette structure, comme les six autres crèches de la Croix-Rouge en Moselle - situées à Bouzonville, Morhange, Trémery et Faulquemont - est située dans une zone rurale. Le théâtre le plus proche se trouve à une soixantaine de kilomètres. De plus, certaines familles n’ont pas les moyens d’aller au théâtre, d’autres parents n’ont pas connaissance de l’existence de spectacles pour enfants ni cette culture », expliquent Laurence Barth et Sylvie Spaniol, coordinatrices de la petite enfance dans le département.

L’ÉPANOUISSEMENT PAR L’ÉVEIL ARTISTIQUE

De nombreuses études ont démontré que l’éducation pré-primaire peut largement et considérablement contribuer à la lutte contre les désavantages éducatifs subis par les enfants issus de familles pauvres ou de minorités. Plus leur socialisation est précoce, plus le risque d’isolement social futur est diminué.

Ce projet, « La fabrique des sens », est donc une opportunité d’accès à la culture pour les enfants qui sont accueillis dans les crèches de la Croix-Rouge française. « Ces établissements ont été choisis pour la diversité des publics qu’ils accueillent. Ces structures défendent l’intérêt d’une certaine mixité sociale en recevant, outre les enfants des parents qui travaillent, des enfants de familles en difficultés ; elles favorisent également l’intégration des enfants en situation de handicap. Elles ont un réel projet social », explique Carine Thomas, en charge des partenariats avec les entreprises au sein de la Croix Rouge française. La CRF, tout comme la Fondation Carla Bruni, espère voir ce projet « prévenir la spirale de la précarité et de l’exclusion pour ces enfants», explique sa directrice, Cléa Martinet. Un engagement qui a le soutien de Bernard Treuvelot, le président du conseil de surveillance enfance et famille de Moselle, et des bénévoles. « On fait un travail important avec les familles à travers un soutien à la parentalité. On les met également en contact avec les bénévoles de l’action sociale si besoin. On assure une prise en charge individuelle et globale de chaque enfant et de chaque famille », explique Laurence Barth, coordinatrice petite enfance en Moselle.

UNE ACTION DANS LA DURÉE

Ce projet ne se limite pas à la représentation du spectacle de marionnettes mais il se poursuit sur la durée à travers la mise en place d’un atelier sur la sensorialité avec les comédiens, dans un premier temps, puis avec le personnel qui se voit remettre une mallette pédagogique pour pouvoir continuer ce travail sur les sens tout au long de l’année. Cet outil permet de mettre en place toute une série de jeux qui sollicitent les 5 sens et qui permet notamment à l’enfant de mieux se situer dans le temps et dans l’espace, de distinguer les sons ou encore d’identifier les formes et les couleurs. Cette mallette a été étudiée pour être attractive. Les couleurs, les matériaux choisis doivent engendrer dès son ouverture des envies de voir, de toucher, de sentir, d’écouter et de goûter. Par ailleurs, pour compléter ce projet, un conteur local sera invité à intervenir cinq fois par an au sein du multi-accueil, toujours dans le cadre de ce partenariat. L’initiative a été très bien accueillie à l’Arc-en ciel. Les petits comme les parents ont été séduits, à l’image de William, le papa de Méissa : « C’est très bien. Car pour ma part, je n’aurais pas eu l’idée de l’emmener au théâtre. Ma fille a découvert un autre univers ». L’un des atouts de ce programme pilote est qu’il pourra être enrichi au fil du temps et être déployé dans d’autres régions et d’autres types de structures de la petite enfance.