Après six semaines de déblaiement de décombres, les premiers abris transitoires érigés par la Croix-Rouge française ont émergé à Delmas 9, au sud de Port-au-Prince. Les habitants du quartier ont participé activement aux opérations avec un dévouement et une motivation exemplaires.

La présidente du comité de quartier de Delmas 9 enlève son casque de chantier, essuie la sueur de son front, et s’exclame en riant : « Allez, la Croix-Rouge française ! On y va ! ». L’enthousiasme du 1er juillet dernier, lors de la première distribution d’outils qui annonçait enfin le début du déblaiement des décombres, n’est pas retombé depuis. Durant six semaines, les habitants de Delmas 9, organisés en équipes de 20 personnes, ont travaillé sous le soleil à dégager leurs maisons détruites, enchevêtrements de fers à bêton tordus et de parpaings écrasés. Les hommes tapaient à la masse tandis que les femmes transportaient les débris. Les décombres ont échoué en périphérie de la ville, dans une décharge gigantesque habilitée par les autorités.

Le choix de Delmas 9

Pourquoi débuter par Delmas 9, ce petit quartier du bas de la ville de Port-au-Prince ? Parce que les destructions y sont, en pourcentage, plus importantes qu’ailleurs ? Parce que l’habitat formel et informel s’enchevêtre ? Parce que les classes moyennes avec leurs maisons effondrées, et ceux en bordure de la ravine qui ont perdu leur pièce d’habitation faite de quatre murs et quelques tôles, vivent ensemble, dans la rue, sous des tentes, depuis maintenant plus de six mois ? Ou bien parce que ce quartier clos, constitué de deux rues principales, d’impasses et de venelles où ne pénétreront pas les engins de chantier, nécessite ce déblaiement à la main, lent et difficile, mais qui en offrant un salaire minimum permet aux habitants de se reconstruire moralement par l’action et dans la dignité ?

Pour toutes ces raisons et bien d’autres encore : logiques de programme, contraintes logistiques et financières, nécessité pour les délégués de la Croix-Rouge d’appréhender la complexité de la construction en milieu urbain, des problématiques foncières et de propriété, d’organiser la rotation des équipes locales pour que chacun ait du travail, et dans le même temps, monter la menuiserie qui construira les abris. Alors, commencer par Delmas 9, pourrait n’être finalement qu’un choix dicté par la raison et la prudence, car il faut savoir commencer petit pour aller loin L’objectif, rappelons-le, est de construire 2 500 abris dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, ce qui permettra de reloger autant de familles.

Une raison, moins "technique", a également conduit à choisir Delmas 9, c’est la rencontre des survivants de ce quartier et des équipes d’urgence de la Croix-Rouge française qui, au lendemain du tremblement de terre, entrent dans ce quartier dévasté pour y installer des citernes d’eau et y distribuer des biens de première nécessité.

Partenariat et responsabilité commune, lorsque l’on livre de l’eau potable et que la population s’organise d’elle-même pour gérer ensuite sa distribution. Ce sont aussi les volontaires de la Croix-Rouge haïtienne, les membres du Comité de l’eau du quartier, c’est le dynamisme de la présidente de ce même Comité, ce sont les jeunes qui veulent du travail, les enfants qui révisent leurs leçons sous la tente plantée près des gravats de leur ancienne maison, l’échoppe sous une bâche où la marchande en riant assure au délégué assoiffé par le soleil de plomb qu’elle a fait provision de son soda préféré. Et encore les sourires, les Bonjours, comment ça va ? Et la gentillesse. Tout cela, c’est la raison même de l’engagement de la Croix-Rouge française auprès de la population haïtienne.

Premiers abris transitoires

Aujourd’hui, après six semaines de dégagements des décombres, les premiers abris transitoires se dressent dans le quartier, émergent des sites dégagés des gravats. Le mot « transitoire » indique clairement l’objectif : il s’agit d’une phase intermédiaire entre le camp de tentes et la reconstruction en dur des quartiers, car, maintenant, il faut que les familles quittent les tentes pour des abris qui les protégeront des intempéries et de la menace des cyclones. Faits d’une structure en bois avec une couverture en tôle, fixés sur une dalle en ciment, ces abris répondent aux normes internationales humanitaires.

La Croix-Rouge française s’est engagée à en construire 2500. « C’est bon, Kwa Wouj Fransé, on y va ! », comme le dit la présidente du Comité de quartier, en remettant son casque de chantier.