Depuis la fin du service militaire, les élèves polytechniciens ont la possibilité de faire un stage de "formation humaine" dans le civil, et plus précisément dans l’humanitaire. Olivier Borély a choisi l’institut d’éducation motrice (IEM) de Villepatour, en Seine-et-Marne, pour vivre durant six mois aux côtés de jeunes handicapés. Une expérience inoubliable.

En quoi consiste votre mission à l’IEM ?

Au départ, j’étais simplement censé développer la communication de l’institut et du Sessad (service d’éducation spéciale et de soins à domicile), rattaché à la structure ; ce que je fais, en construisant leur site internet notamment et en essayant de sensibiliser la presse locale aux activités du centre.Mais ma mission a très vite été bien au-delà. À travers le soutien scolaire, les activités sportives ou les sorties organisées, je prends le temps de parler aux jeunes, de les connaître. Nos âges nous rapprochent et le fait d’être extérieur à l’établissement me permet d’avoir une relation privilégiée avec eux. Je me sens un peu comme leur grand frère. Par exemple, je leur donne des conseils pour leur orientation scolaire, parce qu’ils sont très demandeurs.

Le lien avec le monde extérieur est crucial, dîtes-vous. Vous avez vous-même contribué à des rencontres…

Oui. Par exemple, j’organise un Raid Cross en mars avec la Fondation d’Auteuil de Tournan-en-Brie qui accueille des jeunes adolescentes difficiles venant de familles en situation de crise. Les résidentes vont venir participer à une après-midi sportive en équipes mixtes avec les jeunes handicapés. L’objectif est double : surmonter leurs difficultés respectives, et pour ces jeunes filles qui ont souvent perdu l’espoir, relativiser les choses, rencontrer des personnes qui luttent pour s’en sortir et sont pleines d’énergie.J’ai prévu également une visite à l’université de Marne-la- Vallée avec des jeunes qui souhaiteraient poursuivre leurs études. Enfin, j’ai permis à la Croix-Rouge de faire partie des journées Handivalides (journées de sensibilisation sur le handicap dans toutes les universités de France). Le Sessad a obtenu un stand sur chaque manifestation pour expliquer sa démarche, montrer au public que le handicap moteur n’empêche pas de suivre des études.

Humainement, qu’est-ce que ce stage vous apporte ?

D’abord de la pugnacité. Les personnes handicapées mènent un combat quotidien et malgré leurs difficultés, font preuve d’une grande volonté, d’une soif d’apprendre, une envie d’être actif. Un jeune m’a dit un jour : "Je sais que ça va être deux fois plus compliqué pour moi que pour quelqu’un d’autre, alors je me bats deux fois plus". Ce sont des paroles qui me touchent et me font réfléchir.Ce stage m’a surtout apporté de l’humanité, une tolérance, un regard nouveau sur les gens. En trois mois, j’ai plus appris que dans toute ma vie, à ce niveau-là.

Cette expérience vous a-t-elle transformé ?

Ce n’est pas aussi tranché. Je n’ai jamais eu envie de faire un métier "fermé", où je travaillerais uniquement pour moi et pour gagner de l’argent. Ce stage me conforte dans l’idée de trouver un métier utile, si ce n’est à la société, du moins aux autres.L’IEM est aussi une entreprise mais avec une dimension très familiale, très humaine, où le directeur a un rôle de père de famille et dont les salariés sont les membres de cette famille. J’espère pouvoir entretenir une relation humaine aussi chaleureuse plus tard, dans mon milieu professionnel.

Interview : Géraldine Drot