Pour la Croix-Rouge française, l’accès au logement devrait être le préalable à tout parcours d’insertion et non sa finalité

Chaque année, la trêve hivernale s’achève à la fin du mois de mars. A la Croix-Rouge française, nous luttons toute l’année contre les exclusions. L’ensemble de nos actions vise à venir en aide aux personnes vulnérables, grâce à des dispositifs adaptés à leurs besoins.

« C’est un mythe de penser qu’on meurt plus à la rue en hiver qu’en été. Les personnes sans abri le 31 mars le seront toujours au 1er avril ».  Adjoint au délégué national de la lutte contre les exclusions à la Croix-Rouge française, Sami Chayata insiste sur l’importance d’un accompagnement individualisé des personnes vulnérables, installé sur la durée. « Chacune d’entre elles a des besoins et des difficultés spécifiques. Il est primordial qu’elle soit actrice de son parcours pour favoriser son insertion sociale. On adapte notre aide en fonction d’elle, en termes d’intensité et de temporalité, en appliquant un principe de non abandon».

Vivre en situation d’exclusion

Aujourd'hui, les personnes communément qualifiées de « vulnérables » renvoient en réalité à des situations très diverses. Des individus vivant dans une grande précarité, d’autres touchés par un handicap, des personnes âgées dépendantes, des migrants, etc. Leur point commun ? Se trouver en situation de détresse, qu’elle soit de nature médicale, sociale ou psychique. La Croix-Rouge française applique le principe d’accueil inconditionnel et les accompagne, sans distinction.

Répondre à l’urgence

Sur le territoire national, plus de 200 Samu sociaux de la Croix-Rouge française repèrent les personnes les plus vulnérables. Salariés et bénévoles de l’association vont à leur rencontre et instaurent un lien de confiance. Ils les informent ensuite et les orientent notamment vers les dispositifs de droit commun ou des hébergements d’urgence.

Les personnes en détresse peuvent aussi se rendre directement dans des accueils de jour pour se poser, se renseigner, être orientées vers les services adaptés à leurs besoins, accompagnées par un professionnel ou contacter les systèmes intégrés d’accueil et d’orientation (SIAO) pour obtenir un hébergement.

« En observant les réalités du terrain, on peut recenser les besoins de ces populations, précise Sami Chayata. Toute politique publique devrait se baser sur cette veille sociale pour mettre ensuite en œuvre une politique structurelle de lutte contre les exclusions, et non saisonnière».

A chacun son chemin

Les migrants suivent un parcours différent des autres pour sortir de l’exclusion. « Lorsqu’elles arrivent en France, ces populations ont beaucoup de mal à accéder aux soins, souligne Georgia Fayet, chargée de mission Migrants à la Croix-Rouge française. Or bien souvent, elles ont connu des antécédents de violence et des traumatismes psychiques ».

Ces personnes peuvent accéder à l’hébergement de manière inconditionnelle. Pour celles qui souhaitent demander l’asile, elles sont ensuite orientées vers l’une des Plateformes d’Accueil des Demandeurs d’Asile (PADA), pour monter leur dossier avec l’aide des travailleurs sociaux de l’association. En attendant la décision des instances de l’Etat, les candidats à l’asile sont hébergés dans des établissements dédiés, tels que les Centres d’Accueil de Demandeurs d’Asile (CADA). « On les épaule à tous les niveaux. S’ils obtiennent un titre de séjour, ils peuvent être orientés vers des centres provisoires d’hébergement (CPH) comme celui situé à Quétigny, en Côte-d’Or. Neuf mois durant lesquels la Croix-Rouge française les aide à s’intégrer avant de trouver un logement ».

Un logement d’abord, et après ?

« Pour la Croix-Rouge française, l’accès au logement devrait être le préalable à tout parcours d’insertion et non sa finalité », rappelle Sami Chayata.

La Croix-Rouge française vise une approche globale de la personne en intégrant dans l’accompagnement toutes les dimensions de la vie : il s’agit d’élaborer ensemble un projet, d’ouvrir l’accès aux droits, à l’emploi, aux activités culturelles, d’accompagner à la gestion du quotidien, etc. La liste est longue et nécessite du temps et un engagement réciproque. L’objectif ? Favoriser l’insertion sociale des publics accueillis et accompagnés.

A la recherche d’actions innovantes

Au-delà de cet accompagnement global, la Croix-Rouge s’attache à développer de nouveaux dispositifs pour répondre au mieux aux besoins des personnes fragilisées. A Troyes, une auto-école solidaire a ainsi ouvert ses portes en 2014 pour permettre à ceux qui n’en ont pas les moyens financiers de passer leur permis de conduire. Un atout de taille pour trouver un emploi. En 2016, la structure a accueilli plus d’une centaine de candidats, dont la grande majorité a pu reprendre une activité professionnelle après avoir réussi l’examen.

« Recréer du lien social, c’est un travail qui se joue à différents niveaux », conclut Sami Chayata. « Sur le terrain d’abord, avec nos salariés et nos bénévoles, mais aussi en amont. On essaie de faire évoluer les représentations que l’on peut avoir des personnes vulnérables auprès de l’opinion publique et des acteurs politiques. Elles sont les mieux placées pour penser les solutions aux problèmes qui les concernent. Dommage qu’on ne les concerte pas davantage pour mettre en œuvre nos politiques publiques. La solution se trouve souvent dans la co-construction ! ».

Laurie Goret

À lire dans le même dossier