"La tragédie qui a frappé Haïti le 12 janvier dernier est sans précédent. C’est sans aucun doute la pire catastrophe de ce type que nous ayons connue à l’échelle d’un seul et même pays et, qui plus est, le plus pauvre des Amériques."

En outre, le séisme s’est produit dans la zone la plus peuplée de l’île. La capitale a été touchée de plein fouet, ce qui explique le terrible bilan humain: plus de 220000 morts, 300 000 blessés et près de deux millions de personnes sans abri, selon les estimations. Les dégâts matériels sont tout aussi considérables. La mobilisation internationale a été immédiate. Les volontaires de la Croix-Rouge française ont effectué un travail remarquable, dont la qualité a d’ailleurs été saluée, en particulier par la Croix-Rouge haïtienne. Cette dernière a pour sa part fait preuve d’un courage exceptionnel que tous reconnaissent. Je tiens également à souligner la bonne coordination des opérations de secours au niveau du Mouvement Croix-Rouge Croissant-Rouge, dans un contexte pourtant très chaotique et complexe. Nous avons, je crois, tiré les leçons du tsunami qui a frappé l’Asie du Sud-Est, en décembre 2004. Néanmoins, en dépit de cette extraordinaire mobilisation, nous sommes toujours, six mois après ce drame, dans une situation d’urgence permanente. Les choses avancent, mais elles avancent lentement. Comment pourrait-il en être autrement, compte tenu de l’immensité de la tâche à accomplir ? Près de deux millions de personnes se sont retrouvés sans abri ! L’État lui-même a été mis à genoux par cette catastrophe.

Le contexte humanitaire est particulier. Nous devons à la fois répondre à l’urgence - mettre la population à l’abri, apporter de l’eau, soigner les victimes – remédier aux conséquences de cette catastrophe, mais aussi panser des plaies qui préexistaient – la misère, l’absence de soins, le manque de préparation aux catastrophes. De plus, nous allons poursuivre nos actions de soutien durable auprès de la Croix-Rouge haïtienne. C’est pourquoi nous nous orientons sans délai vers des solutions d’abris stables, voire de reconstruction de l’habitat, de rétablissement de systèmes de distribution de l’eau, de réhabilitation des centres de santé et de formation de leurs personnels soignants. Ne nous voilons pas la face, la situation reste très fragile et préoccupante et va se prolonger ainsi pendant de longs mois encore, voire des années. Malheureusement, comme toujours, notre action est suspendue à l’argent dont nous disposons et, à ce jour, nous ne pouvons nous engager au-delà de deux ans. La Croix-Rouge française a reçu plus de 26 millions d’euros de dons et de contributions institutionnelles pour cette mission en Haïti. J’en profite d’ailleurs pour remercier à nouveau tous nos généreux donateurs. Cette somme permettra juste de couvrir les besoins de la population au quotidien, pour assurer sa survie. Aussi, des investissements supplémentaires seront nécessaires. La reconstruction d’Haïti reste la grande inconnue. Il faut à présent, et très vite, mettre en place une politique sur le sujet, des directives claires, qui nous permettront enfin de sortir de cette logique de survie. J’ose croire que notre action durable permettra à ce pays de renaître de ses cendres et de sortir plus fort de cette terrible épreuve. Le peuple haïtien le mérite tant !

Professeur Jean-François Mattei

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