Depuis 2008, la délégation territoriale de la Croix-Rouge du Loiret est installée dans les locaux d’un ancien collège. Au rez-de chaussée, là où se trouvaient les cuisines, le dispositif d’aide alimentaire de l’association ne désemplit pas. Animé par une équipe intergénérationnelle et multiculturelle enthousiaste, il est resté ouvert tout au long du deuxième confinement, proposant un soutien indispensable aux 190 ménages qui composent sa file active.

« Lors du premier confinement, par précaution, nous avons réadapté le dispositif d’aide alimentaire en mettant en place un système de retrait de colis sur rendez-vous du lundi au vendredi. Pour le deuxième, mieux préparés et mieux équipés, nous sommes restés ouverts trois après-midis par semaine, comme avant, avec un objectif : continuer à apporter une aide qui est essentielle pour les publics que nous accueillons. » Laure-Marie Minière, présidente de la délégation territoriale de la Croix-Rouge du Loiret, souligne la pertinence de ce dispositif et la nécessité de le maintenir, malgré une année 2020 si particulière. Les mardis, jeudis et vendredis, entre 13h30 et 16h30, l’équipe accueille chaque fois une trentaine de ménages, qui reçoivent une aide pour 15 jours, avant de revenir. L’inscription est faite sur dossier, après étude de la situation. « Ce sont des personnes qui doivent être soutenues durablement : l’épidémie de Covid-19 est venue aggraver leur situation mais les difficultés étaient déjà là, complète Laure-Marie Minière. En revanche, oui, le nombre de dépannages a augmenté ces derniers mois, et les besoins des personnes en grande précarité ont explosé. »

Circuit anti-gaspillage

Vers midi, en ce vendredi de décembre, les deux camions chargés à la Banque Alimentaire arrivent sur le parking de la délégation territoriale. Rapidement, l’équipe décharge les véhicules, installe les produits au bon endroit dans la grande salle de distribution. Viande, poisson, œufs, fruits, légumes, pain, biscuits, yaourts, fromages, conserves… « Il y a une place déterminée pour chaque type de denrée, une sorte de stand tenu par un membre de l’équipe, explique Martine Melmoux, bénévole référente pour l’aide alimentaire. Cela permet de proposer un circuit et de donner à chacun ce qu’il souhaite, au fur et à mesure, en évitant le gaspillage. » Outre son caractère anti-gaspillage, cette formule a aussi pour objectif de se rapprocher du fonctionnement d’un magasin traditionnel, où les clients choisissent ce dont ils ont envie. « Respecter la dignité des personnes, c’est aussi cela », enchérit Laure-Marie-Minière.

Bien sûr, il faut composer avec le contenu des approvisionnements. « Pour le frais, nous sommes dépendants de ce que nous recevons de la Banque Alimentaire, mais nous essayons au maximum d’équilibrer les paniers, précise ainsi Martine Melmoux. Parallèlement, nous avons un stock de produits ayant une longue date de péremption et le gérons pour varier les propositions. Cependant, même si les personnes repartent les bras chargés, la Croix-Rouge à elle seule ne couvre pas tous leurs besoins alimentaires. » Certains font appel parallèlement à d’autres associations, d’autres se font aider par des proches, bricolent au quotidien… ne mangent pas tous les jours à leur faim.

Équipe intergénérationnelle

Demandeurs d’asile, personnes isolées, retraités, étudiants précaires... Les situations sont difficiles. Malgré cela, l’équipe garde le sourire : c’est important pour tout le monde, du côté des organisateurs, comme des visiteurs. Mudi, Alice, Salomé, Sylviane, Othilie, Françoise, Roberte, Gérard, Martine, Michel… Une dizaine de personnes est mobilisée chaque jour d’ouverture du dispositif, représentant tous les âges et toutes les cultures. Anciens bénéficiaires devenus bénévoles, volontaires en service civique, bénévoles de longue date, demandeurs d’asile en attente de réponse… L’équipe est multiculturelle et intergénérationnelle, ce qui contribue à l’atmosphère sympathique qui règne en ces lieux. « Cette convivialité et ces échanges entre nous me plaisent beaucoup, souligne Martine Melmoux. Les jeunes apportent leur enthousiasme, des personnes accompagnées reviennent nous aider quand leur situation s’est améliorée, proposent de servir d’interprètes… C’est gratifiant de voir que notre action est vraiment utile. »

Avant 13h30, une file s’installe à l’extérieur. Chacun attend son tour, l’entrée se faisant au compte-goutte afin de respecter les mesures barrières. Françoise François va les chercher à l’entrée, vérifie leur carte d’inscription, note la date de la prochaine visite et les oriente vers le circuit. Une fois les paniers remplis, il faut tout vider sur une table pour enregistrer les produits dans le logiciel de traçabilité de l’aide alimentaire (AIDA). Les personnes reçues ce jour-là remettent ensuite leurs provisions dans de grands sacs, des caddies ou même des valises à roulettes. « On fait avec ce qu’on a », plaisante l’une d’elles avant de repartir vers la sortie, rassurée de pouvoir prévoir les repas de sa famille pour quelques jours au moins. En ces temps incertains, c’est déjà ça.

Reportage : Anne-Lucie Acar

 Crédit photo : Christophe Hargoues

Une hygi-boutique pour les produits d’hygiène corporelle et de la maison

Dans les locaux de la Croix-Rouge du Loiret, on trouve aussi une « hygi-boutique » ouverte trois demi-journées par semaine. Elle permet de proposer des produits d’hygiène corporelle et de la maison à prix très réduits : les visiteurs payent 10 % de la valeur totale de leur panier. « C’est une aide non négligeable car ces articles coûtent cher dans les commerces traditionnels, témoigne Yelena, une cliente. Or, ce sont des choses dont on a vraiment besoin, pour prendre soin de soi ou de son domicile. »

Témoignages

« Jusqu’à mars dernier, je vendais de l’artisanat marocain sur les marchés, dans des foires. Avec le Covid-19, tout cela s’est arrêté, j’ai mis la clef sous la porte. Dans le même temps, j’ai divorcé, je me suis retrouvé à la rue, sans rien. J’ai tout perdu. Alors que j’étais hébergé dans un foyer, on m’a parlé de l’aide alimentaire de la Croix-Rouge française. J’ai pris rendez-vous pour voir si je pouvais entrer dans le dispositif, ce qui était le cas, et je viens donc ici depuis deux mois. Cela me permet d’avoir de quoi manger, d’être un peu moins stressé, d’essayer de me reconstruire dans de meilleures conditions. » Ali, bénéficiaire de l’aide alimentaire

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