La crise du Covid-19 n’épargne pas le monde étudiant. Jour après jour, ils sont de plus en plus nombreux à connaître des difficultés significatives, à basculer, pour certains, dans la grande précarité. Stress, isolement social, rupture dans le parcours de soins, troubles alimentaires, incertitudes, absence de perspectives… Face à cette situation, la Croix-Rouge intensifie son action à destination des étudiants précaires. Dans plusieurs villes de France, des initiatives ciblées se mettent en place sur les campus, en partenariat avec des associations étudiantes, et d’autres suivront dans les prochaines semaines. Exemples avec Dijon (21) et Nanterre (92).

Approvisionnement, logistique et accueil à l’épicerie sociale du campus de Dijon

« En novembre dernier, nous avons été contactés par la Fédération étudiante de Bourgogne inter-associative (FEBIA) pour mettre en place une action commune sur le campus de Dijon. Deux grandes problématiques étaient identifiées : l’isolement social croissant de nombreux étudiants et leurs difficultés pour se nourrir. C’était avant la mesure des deux repas par jour à 1 euro », raconte Arthur Bernardin, référent engagement à l’unité locale de la Croix-Rouge de Dijon. Dans la foulée, une réunion est organisée avec la FEBIA et le Crous, et la décision est prise de créer une épicerie sociale pour les étudiants en situation de précarité. Ouverte trois jours par semaine depuis le mois de décembre, elle est installée dans un bâtiment universitaire et accueille près de 180 étudiants. « L’objectif est de leur permettre de faire des achats à très bas coût (10% du prix du marché), tout en ayant l’occasion d’échanger et de créer du lien avec l’équipe. D’ailleurs, une vingtaine d’étudiants bénéficiaires sont devenus bénévoles à l’épicerie sociale depuis l’ouverture », souligne Arthur Bernardin.

En mobilisant six à huit personnes de l’unité locale, par roulement, la Croix-Rouge de Dijon assure les approvisionnements de denrées alimentaires (avec un camion frigorifique), la logistique, le suivi administratif et financier. Par ailleurs, une vestiboutique a été installée récemment pour proposer des vêtements à petits prix. « Notre objectif est de soutenir la FEBIA, de les aider pour certaines missions mais pas de remplacer ceux qui souhaitent s’engager, ajoute Arthur Bernardin. Même si le contexte est difficile, ce partenariat est une vraie réussite car c’est important pour nous de créer des liens durables avec le monde étudiant, d’être présent auprès de ce public parfois oublié des actions de solidarité. » L’unité locale de Dijon comptant 50% de bénévoles de moins de 30 ans, il n’est pas question d’oublier la jeunesse, et encore moins en ce moment. D’ailleurs, de nouveaux projets, toujours en lien avec la FEBIA, devraient émerger par la suite, notamment sur la thématique de la lutte contre l’isolement. Quant à l’implication de la Croix-Rouge dans l’épicerie sociale, elle est d’ores et déjà actée jusqu’à la fin de l’année universitaire, au mois de juin.

Appui logistique pour les distributions réalisées sur le campus de Nanterre

Près de 1300 étudiants sont hébergés sur le campus de Nanterre, dont 250 à 300 sont en situation de précarité. A la fin du mois de janvier, la Croix-Rouge de Nanterre a été contactée par l’association SOS Etudiants qui avait besoin d’un appui pour les distributions qu’elle organise sur le site, notamment pour la partie logistique de l’opération et pour l’apport en produits d’hygiène. « Cette association, créée après le premier confinement, organise une grande distribution chaque premier samedi du mois, précise Bernardo de Matos, directeur local de l’urgence et du secourisme (DLUS) à la Croix-Rouge de Nanterre. Bien sûr, nous avons accepté tout de suite de contribuer à ces actions, d’apporter le soutien logistique nécessaire et les produits manquants (gel douche, shampoing, dentifrice, protections périodiques, etc.). » Parallèlement, la Croix-Rouge de Nanterre a proposé au Crous et aux associations étudiantes d’intervenir comme coordinateur des distributions et de permettre ainsi une plus grande régularité de la solidarité.

Au-delà de cet appui matériel et logistique pour les distributions, la Croix-Rouge de Nanterre souhaite mettre en place des actions de plus long terme sur le campus. Pour cerner au mieux les besoins, elle était présente à l’université le 28 février afin de réaliser une enquête auprès d’une centaine d’étudiants. Une vestiboutique éphémère et un « point info services » étaient également sur place. « D’après les premiers échanges que nous avons eus avec les jeunes, on pense qu’il y a beaucoup de non-recours aux aides et qu’un accompagnement spécifique pourrait être bienvenu. Par ailleurs, de nombreux étudiants sont en rupture de suivi médical et il y a là aussi des choses à faire, comme organiser une journée avec la venue de dentistes par exemple. Enfin, le besoin en soutien psychologique étant particulièrement fort, il faut travailler pour détecter et orienter vers des professionnels », ajoute Bernardo de Matos. Dans les tous prochains jours, les réponses à l’enquête réalisée devraient permettre de préciser les besoins des étudiants et d’y répondre le mieux possible. Etre à leurs côtés est en effet plus que jamais nécessaire. « Nombre d’entre eux comptent en général sur les jobs étudiants pour tenir jusqu’à la fin du mois, or il n’y a plus d’activité depuis près d’un an. Ils n’ont aucune rentrée d’argent. De plus, l’anxiété et le sentiment de privation de liberté ne peuvent qu’augmenter dans des logements de résidence universitaire généralement petits : 75% font 9 m². Premier confinement, deuxième confinement, couvre-feu, majorité des cours encore aujourd’hui en distanciel, impossibilité de se projeter… Certes, les étudiants sont de bonne volonté, mais certaines situations sont vraiment alarmantes. »

Article d'Anne-Lucie Acar

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