Comment satisfaire les attentes des jeunes et des bénévoles de la Croix-Rouge française en matière de réchauffement climatique ? Vaste question aux réponses multiples. Dans le Val de Marne, la Croix-Rouge française a décidé de se mobiliser sur cette thématique a ainsi organisé le 14 janvier dernier à Créteil une journée de sensibilisation aux pics de chaleur en milieu urbain. Plus de 200 collégiens, cadets de la sécurité civile, étaient présents pour apprendre tout en s’amusant.

Plus 2 degrés. Cette prévision des experts concernant le climat aura des conséquences inévitables sur la santé. Comment venir en aide aux populations impactées ? C’est la question que la Croix-Rouge française a pris à bras le corps en organisant notamment à Cannes en avril 2019 une conférence mondiale « Santé et changements climatiques – Soigner une humanité à +2°C ». 500 experts et acteurs de terrain internationaux y ont dressé un état des lieux des dernières recherches scientifiques et présenté des solutions innovantes pour répondre à ce défi de santé publique.

Suite à un rapport édité sur cette thématique , la Croix-Rouge française a investi deux champs d’action au niveau national que nous résume Marie-Esther Rouffet, administratrice nationale : « Le premier, c’est la mise en place d’une stratégie de Responsabilité sociétale des organisations (RSO) qui nous oblige à orienter nos pratiques en interne vers un comportement plus responsable en diminuant notre empreinte écologique. Nous avons également intégré une stratégie de préparation, de réponse et de relèvement face aux catastrophes (PRRC) afin de mieux préparer les populations de plus en plus touchées par les inondations, les pics de chaleur, etc. et de mieux les accompagner en aval. Le deuxième champ d’action concerne nos bénévoles : nous les invitons à développer des activités au sein des unités locales sur la question du changement climatique et du développement durable (soupes solidaires, ateliers « do it yourself », etc.) ».

Dans le Val de Marne, ce sont les jeunes qui ont incité la Croix-Rouge française à aborder cette thématique. Mais pas n’importe quels jeunes. Depuis trois ans, notre association accompagne huit classes de cinquième de collèges du département, tous implantés en zones prioritaires. Les élèves intègrent le dispositif de cadets de la sécurité civile, mis en place en partenariat avec la préfecture, ou bien l’option Croix-Rouge pour une classe. Ils sont formés à la prévention des risques, rencontrent des acteurs de la sécurité civile, mènent des actions de solidarité, se préparent à passer leur PSC1, etc. « En juin 2019, lors du bilan de fin d’année, les cadets nous ont fait remarquer que la question du climat n’avait pas été abordée. On s’est alors dit que la prévention des risques majeurs et notamment des pics de chaleur en milieu urbain était un bon biais pour parler de réchauffement climatique. D’où l’organisation à la Maison des arts de Créteil (MAC) de cette journée qui constitue l’une de nos premières actions sur la thématique du climat sur notre territoire », explique Philippe Garcia-Marotta, président de la délégation territoriale du Val de Marne.

Êtes-vous prêts ?

Organisée en partenariat avec les grands acteurs locaux (ville, département, intercommunalité) et l’inspection académique, qui a accepté que la journée se tienne sur le temps scolaire, la manifestation s’est scindée en deux temps forts : exposés de différents experts le matin, notamment des personnes en charge du développement durable au sein du conseil départemental et de la structure intercommunale Grand Paris Sud Est Avenir (GPSEA), et exercices interactifs l’après-midi. Les 200 collégiens présents ont ainsi pu participer à l’élaboration d’un jeu de société, « Êtes-vous prêts ? », porté par la Croix-Rouge du Val de Marne. Ce jeu de l’oie permet de sensibiliser le jeune public aux dix risques majeurs pouvant survenir en métropole (vagues de froid ou de chaleur, incendies, feux de forêt, etc.). Directement inspiré d’un jeu conçu par la Plateforme d’intervention régionale de l’océan Indien (PIROI) , une plateforme logistique de la Croix-Rouge française chargée des interventions de secours en cas de catastrophe dans le sud-ouest de l'océan Indien, il sera composé d’un plateau, de pions, d’un dé et de cartes contenant des questions sur chaque risque majeur. Des questions que les cadets de la sécurité civile ont été invités à rédiger. « Nous allons ensuite reprendre leurs travaux, faire le tri dans leurs questions, réécrire si besoin puis organiser des tests dans les collèges où nos cadets sont présents. En juin, suite aux retours d’expérience, le jeu sera prêt à être fabriqué grâce au soutien de nos partenaires, la mairie de Créteil, le GPSEA et le conseil départemental », explique Hervé Pilet, bénévole à la délégation territoriale Croix-Rouge du Val de Marne, à l’origine du projet.

Plusieurs dizaines de boîtes de jeu seront alors distribuées dans les collèges du département et utilisées comme un outil de prévention aux risques majeurs. « Avec le réchauffement climatique, il y a de plus en plus de catastrophes naturelles. Le jeu est un bon moyen d’accrocher les jeunes, d’accroître leur prise de conscience et de mieux les préparer », ajoute Hervé Pilet qui précise que des actions de sensibilisation seront menées à partir du jeu, notamment sur les pics de chaleur en milieu urbain.

En attendant, les collégiens présents à la MAC ont planché sur leur liste de questions : en cas d’éboulement, que faire si vous n’êtes pas en mesure de quitter les lieux ? A quelle vitesse se déplace une tornade ? Comment se mettre en sécurité en cas d’incendie résidentiel ?, etc. Pour chaque risque, une fiche pédagogique dans laquelle ils pouvaient trouver l’inspiration leur était fournie. « C’est intéressant de rédiger des cartes car c’est créatif », dit Imane, élève de 5ème au collège Janusz Korczak à Limeil-Brévanes. Marceline, du collège Jean Moulin à Chevilly-Larue, abonde : « Travailler sur un jeu, ça nous permet d’apprendre tout en nous amusant ».

Si le jeu vise avant tout les jeunes du Val de Marne, il a vocation à être diffusé auprès d’un public plus large (lycéens, résidents en EHPAD, etc.) et « pourquoi pas au national, ça serait un rêve », conclut Hervé Pilet.

Sous le signe de l’innovation

Les jeunes ont également répondu à des questionnaires sur les éco-gestes du quotidien proposés par les animateurs développement durable de GPSEA, participé à un quizz animé par le conseil départemental sur le changement climatique et la transition écologique... De quoi faire faire bouger les lignes : « C’est bien que nos élèves entendent des experts car leurs propos sont plus percutants que ce que je pourrais leur dire en classe », dit Soraya, professeur de mathématiques à Champigny-sur-Marne. Badina, élève de cinquième à Limeil-Brévannes, lui donne raison : « J’ai appris que les gaz à effet de serre qui dégradent le climat n’étaient pas d’origine naturelle. Il faut agir en triant les déchets, en consommant moins d’énergie, etc. ». « Dans ce monde, il y a des urgences telles que la pollution et lors d’une journée comme celle-ci, on essaye de trouver des actions pour avancer et avoir les bons réflexes en cas de danger », ajoute Assidath, élève à Champigny-sur-Marne.

Mais la journée était également placée sous le signe de l’innovation, l’un des axes forts de la Croix-Rouge française en matière de lutte contre le réchauffement climatique. La délégation territoriale du Val de Marne a ainsi présenté l’une de ses dernières acquisitions, la tente rafraîchissante « Hut canicule », utilisable en cas de fortes chaleurs. La structure gonflable de 25 m², qui permet l'accueil d'une dizaine de personnes, abrite un climatiseur dont le gaz est 100 % naturel et écologique. Autre stand, autre innovation : le frigo mobile, dont la Croix-Rouge togolaise vient de faire l’acquisition. L’objet alimenté par l’énergie solaire a été financé par la Croix-Rouge du Val de Marne qui, depuis vingt ans, mène des actions au Togo dans le cadre de l’Action internationale décentralisée (AID). « Dès février ou mars, le frigo circulera dans Lomé, la capitale, afin de fournir des produits rafraîchissants à la population, des yaourts par exemple, sans que la chaîne du froid ne soit rompue, ce qui arrive souvent dans les frigos mobiles traditionnels, avec des impacts négatifs sur la santé », explique Kodjo Agba, délégué à l’AID à la Croix-Rouge togolaise.

Bref, une journée riche sur le plan pédagogique et humain. De quoi satisfaire Philippe Garcia-Marotta : « Nous avions un double objectif : développer les connaissances des jeunes en matière de réchauffement climatique et, grâce au jeu notamment mais aussi à l’option Croix-Rouge, qu’ils en deviennent des acteurs et qu’ils sachent réagir en cas de catastrophes naturelles ». Et le Professeur Jean-Jacques Eledjam, président de la Croix-Rouge française, de conclure la journée devant les collégiens : « J’aurais aimé être à votre place à votre âge et qu’on me demande comment faire pour que la terre continue de nous abriter. Aujourd’hui, vous avez les réponses car vous pouvez vous informer sur les conséquences du réchauffement climatique en matière de santé et transmettre ces informations à votre entourage. Nous sommes tous voués à un même destin : sauvegarder la terre, qui nous a été transmise en héritage, et faire en sorte de l’entretenir pour pouvoir la transmettre aux générations suivantes ».

Anne Dhoquois

Crédit photo : Didier Pazery