Créé en novembre 2003, le samu social de Nice intervient certes en hiver auprès des plus démunis, mais poursuit également – fait plus rare – ses tournées en été, proposant des produits de premières nécessité et une écoute à des personnes, souvent familières, qui ont fait de la rue leur refuge. Parce que l’exclusion ne connaît pas les saisons…

L'urgence sociale en été

Il est 18 heures sur une grande place de Nice, les trottoirs chauds et le soleil encore haut rappellent que l’été s’installe sur la baie des Anges. Au milieu des lauriers en fleurs, personne ne fait attention au véhicule Croix-Rouge, celui du samu social. Peut-être parce qu’il fait partie du décor de la ville, et que de le voir circuler jusqu’à minuit est devenu une habitude.

L’équipe du Samu, composée de salariés et de bénévoles, est au rendez-vous pour la virée quotidienne vers les points d’ombre de la ville.

« C’est une demande de la Ville de Nice et de la CRF de voir fonctionner le Samu Social toute l’année et tous les jours » explique Sylvie Demangeat, responsable départementale des affaires sociales de la Croix-Rouge. Subventionné en parti par le Conseil Général et la DDASS, ces aides rappellent qu’en France sur 69 samu sociaux, 49 sont couverts par la CRF. Mais la particularité à Nice c’est cette extension annuelle. « Il y a autant de monde l’hiver que l’été, énormément de sans abri, de jeunes errants et d’itinérants qui descendent du Nord… le samu est un besoin réel » assure Sylvie.

La porte du camion coulisse et claque, les acteurs sociaux de la nuit portent tous la même tenue Croix-Rouge, celle qui leur permet de créer plus facilement des liens de confiance avec les personnes en rupture sociale. Dressés sur la banquette arrière, agrippés au dossier des sièges, les membres de l’équipe ne cessent de tourner la tête à droite, à gauche, ils sont à l’affût de ceux qui semblent avoir besoin d’aide, ceux qui n’osent plus tendre la main, ceux que les gens ne voient même plus…

Cachés derrière une porte cochère à l’ombre, assis près d’une fontaine, ces hommes et ces femmes isolés savent que la Croix-Rouge ne les a pas gommés de la ville. Les volontaires connaissent leurs noms, leur histoire, leur parcours, et savent qu’ils ont besoin d’eux toute l’année. « Notre façon de travailler ne change pas, commente Damien, coordinateur et chef d’équipe. On répond aux appels du 115 , on a des endroits stratégiques dans la ville : la gare, le centre d’hébergement d’urgence, les points soupes. On maraude aussi sur la plage… Si l’exclusion est certes plus insupportable l’hiver à cause du froid, elle reste une réalité très difficile à vivre l’été. »

Apporter une aide constructive

Chaleur, agressivité, violences exacerbées par le mélange détonant alcool-désespoir… La mission de l’équipe Croix-Rouge repose surtout sur l’écoute afin de désamorcer les tensions et d’apaiser le climat. « La difficulté, c’est que les structures d’accueil de nuit ferment ; conséquence : les sans abri, à l’exception des personnes en grand danger, sont privés de toit et donc plus vulnérables » précise Anne-Marie, également coordinatrice. C’est pour cette raison que les couvertures et les kits d’hygiène se distribuent comme des petits pains, autour d’un café, d’une boisson fraîche ou d’une brioche. « La démarche consistant à aller vers eux est déterminante ; et lorsqu’on décroche un sourire, nous savons qu’un premier résultat est atteint » confie Brigitte, salariée du dispositif CRF.

Extrêmement motivés, les membres du samu social sont complémentaires et compétents, ce qui crée une dynamique d’équipe indispensable. « Chacun doit être près à un vrai face à face permettant de tisser des liens d’humanité, trouver les mots pour apporter une aide constructive, tout en évitant l’assistanat, conclut Sylvie. D’où l’importance d’agir tout au long de l’année…». Une façon de témoigner sans ambiguïté que ce type de dispositif d’urgence sociale gagne en efficacité à opérer, durablement, en toutes saisons. A l’image de l’exclusion…