La Bretagne connaît depuis le 24 décembre 2013 des alertes météorologiques à répétition. Des intempéries, ponctuées seulement par de brèves accalmies, et au gré des crues et décrues, une mobilisation des secouristes et bénévoles de l’action sociale de tout le département quasiment permanente. Dernière intervention en date, le 14 février dernier, lors de la tempête Ulla.

Le vendredi 14 février, une nouvelle alerte aux vents violents est lancée. Dès les premières heures du jour, le directeur départemental de l’urgence et du secourisme (DDUS),  Elouan Rolland, enclenche la pré-alerte par SMS à tous les secouristes et bénévoles de l’action sociale. Malgré la fatigue, ils sont nombreux à se rendre disponibles pour la soirée et la nuit en cas de nécessité. 

D’une alerte à l’autre

Après les tempêtes Petra, Ruth et  Qumaira, la tempête Ulla frappe les côtes bretonnes et l’intérieur du pays. Des rafales de vent à plus de 140 km/heure soufflent dans la soirée et, première conséquence, entraînent une coupure électrique sur le réseau ferroviaire entre Brest et Rennes. Près de 2 000 personnes sont bloquées dans les gares bretonnes. La délégation départementale d’Ille-et-Vilaine est appelée par la préfecture pour prêter main forte à la SNCF en gare de Rennes. Suite à la pré-alerte matinale, le DDUS n’a eu qu’à relancer ses effectifs par SMS pour les informer de la situation et les faire venir à la délégation départementale.

Une vingtaine de bénévoles se mobilisent pour aider à la mise en place des trains-dortoirs, afin d’héberger 800 naufragés du rail et procéder à l’installation de couvertures, kits de nuit et paniers repas fournis par SNCF Assistance. 

Gérer l’urgence dans la durée

Pendant ce temps, à Redon, à 65 kilomètres au sud-est de Rennes, tous les bénévoles ont été mis en veille également. Depuis le 7 février, la Vilaine et l’Oust débordent et certaines rues de cette commune de 9 500 habitants sont submergées. Une quinzaine de secouristes de l’unité locale et des bénévoles de l’action sociale sont depuis cette même date aux côtés des personnes sinistrées. Il a d’abord fallu monter les meubles sur des parpaings en prévision de la montée des eaux et puis, chaque jour, leur rendre visite pour leur apporter de l’aide ou une écoute. Tous les bénévoles sont d’ailleurs formés au soutien psychologique.

En binôme, ils vont frapper à chaque porte pour s’assurer que le moral est bon et que la situation n’a pas empiré. Agnès et Yves-Marie ont eu 25 centimètres d’eau dans leur maison, l’action des bénévoles est très importante pour eux: « les visites de la Croix-Rouge font du bien car on se sent moins seul. Et puis ils ont été parfaits, ils nous ont aidés à nettoyer notre maison alors que nous n’avions plus la force morale de le faire. Ils sont à nos côtés et leur soutien nous réconforte vraiment ». Françoise a eu plus de chance car sa maison est surélevée, mais elle doit tout de même franchir des petits ponts de fortune, construits avec des parpaings et des planches, pour sortir de chez elle. Comme elle vit seule, elle est rassurée par la présence des bénévoles : « ils sont d’un grand appui pour monter les meubles et surtout ils témoignent d’une grande solidarité. Je sais que je ne suis pas seule et que si j’ai besoin, ils sont là. » Une disponibilité et un dévouement effectivement à toutes épreuves, car la plupart des bénévoles ont par ailleurs un métier ou poursuivent des études. Néanmoins, ils sont présents tous les jours. Ce qui les fait tenir dans la durée, c’est « d’abord l’envie d’aider les autres, mais aussi la reconnaissance des personnes sinistrées, comme le confie Manuel Haurillon, secouriste. On n’attend pas les remerciements, mais c’est valorisant et motivant. Cela nous aide à puiser dans nos forces car c’est une confirmation de la légitimité de nos actions. »

Les intempéries qui frappent la région sont exceptionnelles par leur durée. Depuis le 7 février, les unités locales de Redon, Saint-Malo, Rennes, Vitré, Saint Aubin d'Aubigné  - sont mobilisées et envoient des effectifs sur le terrain. Pour les bénévoles, cela signifie rester mobiliser 24 heures sur 24 quasiment, se tenir prêt à intervenir à chaque alerte - ou fausse alerte -. A force, l’on pourrait redouter un essoufflement de leur part. Or, il n’en est rien, tous affirment être prêts à continuer, malgré la fatigue. La situation va sans doute rester tendue durant les semaines qui viennent, les sols étant gorgés d’eau et la période pluvieuse ne faisant que commencer.

Reportage de Nathalie Auphant et Yann Le Borgne