L’océan Indien est la troisième région au monde la plus touchée par des événements climatiques extrêmes qui risquent de se multiplier davantage encore. Protéger la population face à ces défis, telle est l’ambition du PIROI Center, inauguré ce 21 novembre à La Réunion. Ce centre régional d’expertise, de formation et d’innovation est entièrement dédié à la gestion des risques de catastrophes et à l’adaptation au changement climatique.

Interview de Christian Pailler, responsable de la plateforme d’intervention régionale de l’océan Indien (PIROI)

D’où vient l’idée de créer le PIROI Center ?

Le PIROI Center est une évolution logique et progressive de la PIROI, créée en 2000. Le centre englobe d’ailleurs toutes les activités historiques de la PIROI - préparation, sensibilisation, réduction des risques, interventions d’urgence - mais va les amplifier, les renforcer et accroître leur périmètre. Le déclic est venu du constat suivant, étayé par plusieurs études : le manque de réseau et de capitalisation des connaissances. En effet, de nombreuses autres organisations travaillent sur la gestion des risques de catastrophes et l’adaptation au changement climatique mais sans lien entre elles. Nous travaillons nous-mêmes au sein de notre ‘’monde Croix-Rouge”. La première vocation du PIROI Center est donc de devenir un espace de collaboration entre tous les acteurs concernés : ONG, États, acteurs de sécurité civile, politiques, humanitaires, chercheurs, formateurs… qui viennent rejoindre les membres historiques de la PIROI, à savoir les 7 Sociétés nationales de l’océan Indien, la Croix-Rouge française, la Fédération internationale (IFRC) et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

La formation est l’un des volets clés du PIROI Center. En quoi est-ce essentiel ?

Depuis 2008, nous avons formé plus de 5 000 personnes et nous recevons beaucoup de demandes de formations liées à la gestion de catastrophes, y compris de la part des gouvernements. Cela nous a mis la puce à l’oreille. Vous le savez, La Réunion est fortement exposée à tous les aléas naturels, hormis les tempêtes de neige ! Or, il n’existait jusqu’à récemment aucune formation diplômante dans ce domaine. Alors, il y a 4 ans, nous avons impulsé la mise en place d’un Master «Risques et Environnement» sur deux ans, en partenariat avec l’Université de la Réunion, qui balaie tout le cycle des catastrophes. Aujourd’hui, 80 % des jeunes sortent avec un emploi à la clé ! La gestion des risques devient un vrai métier. C’est une vraie fierté ! On essaie désormais d’avoir des liens avec d’autres universités de la région, notamment à Madagascar et à Maurice. Notre challenge, c’est de créer tout un réseau universitaire qui travaille ensemble sur les risques naturels.

Le PIROI Center se veut aussi un pôle de recherche et d’innovation…

En effet, nous développons aussi la recherche appliquée au service des acteurs humanitaires. Pour cela, on s’appuie sur notre réseau – nous avons un partenariat très étroit avec la Fondation Croix-Rouge française pour la recherche – et des experts extérieurs, scientifiques, chercheurs, universitaires… Nous collaborons ainsi avec Météo France, par exemple, sur les prévisions cycloniques. Et puis, nous testons nous-mêmes des innovations avant de les mettre sur le marché. Nous avons conçu des bâches phosphorescentes qui permettent d’apporter de la lumière lorsqu’après une catastrophe des dizaines de milliers de personnes se retrouvent sans électricité, ou encore des bornes de rechargement des téléphones fonctionnant à l’énergie solaire. Ces innovations émanent directement des besoins des populations affectées par une catastrophe et de nos observations sur le terrain.

Au regard des catastrophes qui frappent régulièrement l’océan Indien, comment mieux préparer la population ?

Nous avons un seul et unique objectif : mieux préserver la vie des personnes qui pourraient subir des dégâts liés aux phénomènes naturels. C’est un enjeu collectif. Il faut anticiper les crises, travailler ensemble, canaliser les forces de tous les acteurs pour les mettre au service des populations. Rendre une population plus résiliente, cela passe par un travail sur son environnement. Par exemple, planter des mangroves sur les côtes du Mozambique, afin de lutter contre l’érosion qui menace les communautés. Cela passe aussi par plus de sensibilisation et une meilleure éducation, en touchant de nouveaux publics, pour qu’ils apprennent à se protéger. Le PIROI Center, en déployant ses actions à plus grande échelle, en associant le maximum d’acteurs clés de la gestion des risques de catastrophes, en menant des actions de plaidoyer auprès des États, des partenaires institutionnels et financiers et des organisations internationales a pour ambition de répondre à tous ces enjeux.

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