“En plus d’avoir des effets immédiats, le changement climatique se fait ressentir sur le long terme, c’est pourquoi il est essentiel d’agir dès maintenant en anticipant les risques à venir”.

Ces mots sont ceux de Sarah, notre référente technique en adaptation au changement climatique. En une phrase, elle résume l’un des axes majeurs de notre stratégie internationale à l’horizon 2030 : investir en amont des catastrophes et des crises sanitaires pour réduire leurs impacts sociaux, environnementaux, sanitaires, économiques et politiques.

Une catastrophe, rappelle Sarah, n’est pas naturelle. Elle résulte de la combinaison entre un aléa — cyclone, séisme, inondation, etc. — et la vulnérabilité des populations exposées. La pauvreté, l’exclusion ou la précarité fragilisent les communautés et les rendent plus vulnérables face aux aléas ; c’est dans ces conditions que survient la catastrophe.

Pour réduire cette vulnérabilité, la Croix-Rouge française multiplie les actions de prévention, d’atténuation et de préparation. L’une d’entre elles consiste en l’élaboration de protocoles d’action précoce, ou PAP, conçus pour permettre d’intervenir avant que la crise ne s’amplifie. 

Anticiper plutôt que subir : c’est donc tout l’enjeu des PAP. Leur principe ? Réagir vite et efficacement entre le moment où l’alerte est donnée et celui où l'aléa frappe. Concrètement, élaborer ces protocoles permet, en amont des catastrophes, d’identifier les risques, d’évaluer leurs impacts potentiels et de déterminer les actions pour éviter le pire. Une fois le document validé, il y a tout un travail de formation des volontaires, de prépositionnement de matériel d’urgence, de surveillance des indicateurs liés aux aléas, etc. Dès qu’un seuil critique est atteint, des actions rapides sont déclenchées afin de limiter l’impact de l’aléa à venir.

Au Niger, dans la région de Zinder, où la sécheresse s’ajoute à un contexte sociopolitique fragile, l’insécurité alimentaire et nutritionnelle est une menace constante. Pour y faire face, la Croix-Rouge nigérienne, avec l’appui de la Croix-Rouge française, a mis en place un PAP dédié à la préparation aux épisodes de sécheresse. Ce dispositif permet d’agir dans la fenêtre de temps entre l’alerte et l’impact de l’aléa : si certains seuils de déficit de pluviométrie sont atteints, les équipes déclenchent des actions concrètes — distribution de semences résistantes à la sécheresse pour garantir un rendement minimal, approvisionnement des banques de céréales à prix subventionnés, et transferts monétaires aux familles les plus vulnérables pour leur permettre d’accéder aux céréales. L’objectif est clair : limiter l’impact d’une mauvaise saison des pluies avant qu’elle ne se transforme en crise alimentaire et nutritionnelle.

Dans d’autres régions du monde, ce ne sont pas les sécheresses mais les ouragans, la montée des eaux, etc. qui menacent les communautés. Les petits États insulaires figurent parmi les plus vulnérables face à ces phénomènes dont la fréquence et l’intensité sont renforcées par le changement climatique. Dans le cadre du projet 3 Océans, la Croix-Rouge française élabore un protocole d’action précoce avec les Croix-Rouge de Antigua-et-Barbuda, de la Dominique et de Saint-Christophe-et-Niévès afin de limiter les impacts des ouragans. Ce PAP a une portée régionale et favorise la coopération entre les pays, l’échange d’expertise et la mutualisation des moyens de prévention et de réponse. Il harmonise les déclencheurs, le financement et la coordination, tout en permettant une adaptation aux spécificités de chaque territoire. L’objectif : réduire l’impact des catastrophes en s’appuyant sur les données scientifiques, les prévisions météorologiques et les connaissances des communautés locales.

Mais les PAP ne servent pas seulement à anticiper les aléas naturels, ils sont aussi essentiels pour prévenir les risques épidémiques. Au Cameroun, la Croix-Rouge camerounaise, avec le soutien de la Croix-Rouge française, a mis en place un PAP choléra. Le dispositif repose sur des indicateurs précis, comme le niveau de précipitation : lorsqu’un seuil est atteint, l’alerte est donnée et des volontaires sont immédiatement déployés pour évaluer la situation. Si le risque épidémique est confirmé, des actions rapides sont déployées, allant de la distribution de comprimés de purification de l’eau à la désinfection des infrastructures liées à l’eau, aux soins et à la santé, et à la sensibilisation des communautés. Et si des cas sont détectés, les interventions sont intensifiées pour limiter la propagation. Cette approche proactive transforme la manière de gérer les épidémies, en plaçant la prévention au cœur de l’action. 

Ainsi, chaque PAP définit clairement quand agir, quelles mesures mettre en œuvre et comment les coordonner. Les ressources sont disponibles, les moyens prépositionnés, et les actions planifiées à l’avance. L’intervention n’est jamais improvisée : tout est organisé pour réagir efficacement dès l’annonce d’un risque. Cette année, la journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe met l’accent sur la résilience. Avec ses partenaires internationaux, la Croix-Rouge française illustre concrètement cette approche ; si les aléas peuvent être naturels, les catastrophes ne le sont pas. Anticipées, elles peuvent être atténuées et leurs conséquences limitées.