Se former aux gestes qui sauvent, pour aller de l’avant
Publié le 24 novembre 2015
« Toutes les personnes qui sont là aujourd’hui se sont inscrites dans les heures qui ont suivi les attentats. » Joyce, secouriste et formatrice à la Croix-Rouge française, s’apprête à assurer cette journée de formation aux premiers secours (PSC1) dans un contexte un peu particulier : face à elle, dix personnes qui, de très près ou d’un peu plus loin, ont été touchées par les atrocités commises à Paris quelques jours plus tôt…
Avec 278 secouristes engagés, 56 véhicules mobilisés et la prise en charge de 30% des victimes des attentats, la Croix-Rouge française a géré l’urgence, dans le cadre de sa mission de secours et d’assistance aux personnes en danger. Depuis, l’association reçoit de nombreux appels des délégations locales, et des e-mails au siège : nous constatons une demande exponentielle de personnes qui souhaitent se former aux gestes de premiers secours, observe Christophe Talmet, délégué national chargé de la formation. On perçoit une vraie prise de conscience citoyenne, un besoin de pallier le sentiment d’impuissance partagé par un grand nombre de franciliens la semaine dernière... »
La délégation locale du 15ème arrondissement de Paris dispense la formation « PSC1 » tout au long de l’année, plusieurs fois par semaine. Mais en ce samedi matin, ce n’est pas vraiment comme d‘habitude. L’attention portée aux différents modules – perte de connaissance, étouffement, hémorragie, massage cardiaque, malaises, initiation à la réduction des risques, etc. – est encore plus soutenue.
L’émotion des participants est éminemment palpable. Après ce qui s’est passé, dans une période où le choc est encore tellement présent, chacun se dit que ce qu’il apprend aujourd’hui pourra lui servir demain. La devise de la Croix-Rouge française – « Préparez-vous à être prêts » - est donc plus que jamais d’actualité. « Il ne s’agit pas de vivre dans la psychose permanente mais de connaître son environnement et de savoir réagir en cas d’accident ou de catastrophe, quelle qu’elle soit, ajoute Christophe Talmet. Autrement dit, de devenir un acteur conscient, plutôt qu’un spectateur paniqué ». En effet, la formation aux premiers secours permet de faire de la prévention. Mais quand l’accident est là, quand un proche a besoin d’aide, quand une catastrophe survient, elle devient, incontestablement, un outil de l’action.
Trois questions à Joyce, 22 ans, secouriste et formatrice Croix-Rouge française
Quels sont pour vous les grands atouts de la formation « premiers secours niveau 1 » ?
De l’arrêt cardiaque aux brûlures, de la perte de connaissance aux traumatismes, cette formation couvre la quasi-totalité des accidents que l’on peut rencontrer dans la vie quotidienne. Elle se déroule sur une journée et permet d’avoir des temps d’échanges avec les participants, qui ont généralement de nombreuses questions. En effet, c’est souvent une expérience personnelle qui sert de déclic pour l’inscription. Il est donc indispensable de parler du vécu des uns et des autres pour que les enseignements dispensés répondent au mieux aux besoins.
Les attentats de vendredi dernier et le contexte actuel donnent-ils à cette session une résonnance particulière ?
Toutes les personnes présentes se sont inscrites dans les heures qui ont suivi les attentats. Elles étaient sur place et n’ont pas su comment réagir devant des victimes blessées. Ce qu’elles apprennent aujourd’hui pourra concrètement leur servir, voilà ce que chacun a en tête, et cela se ressent fortement dans le groupe. Il y a énormément d’émotion, on sent que les larmes ne sont jamais très loin. Parallèlement, les participants ont besoin d’éléments très concrets, comme s’ils allaient devoir les mettre en pratique dans les heures à venir.
Chaque année, 4 000 formateurs bénévoles de la Croix-Rouge française initient et forment le grand public, adultes et enfants, aux gestes qui sauvent. Pourquoi est-ce important ?
Parce que cela permet de sauver des vies ! En effet, la mort de 10 000 personnes pourrait être évitée chaque année si 20% de la population était formée aux gestes de premiers secours. Par ailleurs, les attentats ont montré que cela n’arrive pas qu’aux autres, que chacun peut se retrouver dans une situation où il aimerait pouvoir venir en aide à son voisin. Compte tenu du contexte, la formation d’aujourd’hui est particulièrement riche de sens et j’admire beaucoup les personnes qui se sont inscrites : leur réaction, vouloir se former aux gestes qui sauvent, est la plus belle réaction que l’on puisse avoir après ce type d’événements. Je trouve très courageux de se dire : « si cela se reproduit demain, je veux pouvoir agir ».