Depuis un an, la Croix-Rouge de Rennes déploie un dispositif innovant : une unité médicale mobile (UMM) – baptisée « Le Camion » – qui effectue des tournées dans la ville pour aller soigner les gens de la rue. Avec l’épidémie de Covid-19, l’équipe a revu ses missions afin de parer au plus urgent : identifier les personnes fragiles et les mettre à l’abri, puis, dans un second temps, réaliser une veille sanitaire auprès des publics désormais hébergés dans des structures fixes.

Le docteur Patrick Seyeux a exercé durant 35 ans comme médecin de campagne avant de contribuer à la création de l’unité médicale mobile (UMM) de la Croix-Rouge de Rennes et d’en devenir le médecin bénévole. En douze mois, 1500 consultations ont été réalisées à bord de ce camion, dont l’intérieur a été aménagé en cabinet médical. « 1500 consultations en un an... C’est un résultat alarmant, car il nous rappelle que beaucoup de gens, de plus en plus jeunes et avec de multiples dépendances, sont à la rue, mais c’est aussi un résultat satisfaisant puisqu’il confirme que la mise en place d’un tel dispositif était nécessaire. Un dispositif qui permet en outre de voir les patients en amont, avant l’irréversibilité des pathologies », explique le docteur Seyeux. Deux jours par semaine, avec un chauffeur bénévole au samu social et une infirmière volontaire, il sillonne les rues de Rennes et va à la rencontre des personnes les plus exclues, « celles qui ne vont jamais se faire soigner ».

Avec l’épidémie de Covid-19 et le confinement, les missions de l’UMM ont été adaptées, la durée des tournées sensiblement allongée, pour répondre à l’ensemble des demandes de soins. Le docteur Patrick Seyeux témoigne.

« Durant les premiers jours du confinement, nous avons intensifié nos maraudes médicales afin d’identifier les personnes fragiles et de les orienter vers les dispositifs d’hébergement d’urgence mis en place par la ville de Rennes dans le cadre de la lutte contre la propagation de l’épidémie. Très rapidement, une grande partie des sans-abri a pu être logée dans des structures fixes (foyer, auberge de jeunesse, hôtels réquisitionnés, etc.). A ce moment-là, notre mission a évolué : nous continuons à faire quelques maraudes, car il y a toujours quelques personnes à la rue, et elles ont évidemment besoin de nous… Mais nous y avons ajouté une tournée auprès des structures fixes, pour assurer un suivi médical des publics qui y sont accueillis durant le confinement. Ainsi, quand ils voient que le camion est présent sur le parking, ceux qui ont besoin de se faire soigner viennent nous voir… Et on les soigne ! Cela nous permet aussi d’effectuer une veille sanitaire auprès de toutes ces personnes. Une activité que nous allons poursuivre dans les prochaines semaines.

Il n’était pas question pour moi de rester sans rien faire pendant cette crise. Cela fait 35 ans que je soigne, que je m’occupe des autres, et je n’ai aucune envie que ça change ! Mettre mes compétences au service des personnes qui en ont le plus besoin était donc une évidence. D’ailleurs, s’il n’y avait pas eu ‘le camion’, je me serais porté volontaire pour reprendre du service dans un hôpital, sur n’importe quel poste… Mais, grâce à ce dispositif, grâce à mon engagement à la Croix-Rouge française, je contribue, à mon échelle, à aider les plus vulnérables durant cette épidémie. »

Anne-Lucie Acar - Crédit photos : Livia Saavedra

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