Plus d’une semaine après les violentes intempéries survenues dans l’Aude, dans la nuit du 14 au 15 octobre dernier, les dégâts restent immenses. Il faudra du temps aux sinistrés pour effacer toute la boue accumulée dans leurs maisons, pour faire le deuil de proches ou de voisins disparus, pour retrouver l’énergie de vivre. L’état de catastrophe naturelle a été déclaré pour 126 communes. Toutes ont été visitées par les bénévoles de la Croix-Rouge française qui poursuit ses opérations de nettoyage des maisons et d’écoute auprès des habitants.

Samedi 20 octobre 2018. Rémi Batz, l’un des quatre conseillers techniques nationaux opérationnels (CTNO) mobilisés à Carcassonne, accueille les nouveaux bénévoles arrivés en renfort à la cellule arrière départementale mise en place par la Croix-Rouge française. Il fixe le cap pour la journée : « 55 communes ont été visitées hier par les équipes, 15 d’entre elles nous attendent aujourd’hui pour des opérations de nettoyage et nous devons d’ici ce soir évaluer les besoins des 71 communes restantes. » Cinq jours après les inondations, alors que 126 communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle, il reste encore beaucoup à faire. Depuis le début de la semaine, la Croix-Rouge française intervient auprès des populations sinistrées, dans les meilleurs délais et le plus efficacement possible. La base arrière est installée à Carcassonne, d’où sont pilotées ses principales missions : hébergement des personnes évacuées dans les heures qui ont suivi la catastrophe, opérations « coup de main coup de cœur », accueil et écoute de la population.

Plus de 300 secouristes mobilisés

Eux-mêmes fortement marqués par l’ampleur de cette catastrophe - l’unité locale de Carcassonne a été entièrement inondée -, les bénévoles de l’Aude voient arriver avec soulagement les renforts de secouristes. Ils viennent du Gard, du Var, des Landes, du Rhône, du Vaucluse, de l’Hérault… En cinq jours, ils sont plus de 300 à avoir pris la route pour l’Aude : « Ils représentent près de 80 % des effectifs mobilisés », précise Vincent Falgairou, responsable du département Expertise Technique et Urgences internationales à la Croix-Rouge française, qui coordonne l’opération. Un renfort plus que bienvenu donc, d’autant plus que l’énergie et le dynamisme sont au rendez-vous. Et cela quelles que soient les missions à effectuer, les quantités de pelletées à remplir ou de charrettes à évacuer. Pour tous, venir aider était une évidence et l’accueil que leur réserve les habitants sinistrés confirme la pertinence de leur présence.

Des maisons et des hommes dévastés

« Quand j’ai fini par réussir à rentrer chez moi, je n’ai pu que constater les dégâts : une partie de la maison – cave et rez-de-chaussée – était remplie de boue. Il y a des tonnes et des tonnes de choses à jeter », raconte Pascale, habitante de Conques-sur-Orbières, un village fortement touché par les inondations. « Après le choc, ce qui me marque le plus aujourd’hui, c’est toute l’aide que j’ai reçue : les voisins, les pompiers, la Croix-Rouge française venue en nombre…  Cette solidarité me touche énormément », dit-elle avec émotion. Alors que deux équipes de 12 bénévoles de la Croix-Rouge s’attaquent à la boue du sous-sol avec une efficacité remarquable, Pascale se joint à eux, bottes au pieds. C’est cela une opération « Coup de main coup de cœur » : des bras, mais aussi un soutien moral, des mots de réconfort, une écoute attentive : « Les habitants ont besoin de parler, de partager leur détresse, pour prendre conscience de la situation et rebondir ensuite », explique Tommy, bénévole Croix-Rouge venu du Vaucluse.

Après l’urgence

Outre le fait d’avoir tout perdu ou presque, les sinistrés ont vécu un immense traumatisme. Beaucoup avouent avoir eu peur de mourir. « L’eau montait, montait… Elle a fini par partir, oui, mais on a cru que cela ne s’arrêterait pas », témoigne Delphine, une habitante de Cazilhac qui a passé une partie de la nuit du 14 au 15 octobre debout sur une table avec sa famille, dans l’angoisse. Evacuer ce traumatisme ne se fait pas tout seul. Le soutien des bénévoles peut s’avérer important. S’ils sont formés à l’écoute, ils peuvent néanmoins se retrouver dépassés par les événements, par la détresse des personnes et affectés personnellement. Pour les épauler dans cette mission délicate, Geoffroy, référent national sur le soutien psychologique, reprécise les contours de l’écoute et leur donne son numéro de portable : « Je suis là pour vous soutenir si vous êtes confrontés à des situations trop difficiles », leur dit-il. A l’issue des opérations « Coup de main coup de cœur » et des évaluations des besoins dans les 126 communes impactées, la délégation territoriale de l’Aude va progressivement reprendre ses actions traditionnelles sur le terrain, assurée « de la solidarité de toute la famille Croix-Rouge » a promis le président national, le Professeur Jean-Jacques Eledjam, venu dans l’Aude le 20 octobre dernier pour soutenir et remercier les bénévoles mobilisés auprès des personnes sinistrées.

Reportage Anne-Lucie Acar, photos Aude Le Borgne

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