Faire face au choc climatique : nos propositions pour une meilleure préparation individuelle et collective

Inondations, vagues de chaleur, sécheresse, feux de forêt, tempêtes, cyclones : depuis plusieurs années, les crises climatiques se multiplient et leurs répercussions ébranlent la population française. C’est dans ce contexte de bouleversements profonds que nous publions notre deuxième édition du Rapport sur la résilience de la société française. Développé avec la participation du Crédoc (Centre de Recherche pour l'Étude et l'Observation des Conditions de Vie) et l’appui de la Fondation Croix-Rouge, il étudie cette année l’impact des chocs climatiques sur les individus : “Événements climatiques extrêmes : sommes-nous prêts à l’inévitable ?”

 Face à des crises climatiques en séries : la population française mal préparée

Les projections les plus récentes indiquent que l'augmentation de la température moyenne de 1,5 °C sera atteinte dès le début des années 2030, indépendamment des efforts de réduction des émissions mondiales de CO2. Le changement climatique n'est donc plus une menace lointaine, mais bien une réalité quotidienne. Et les dégâts qu'il engendre vont croissant.

50 millions de Français ont ainsi été exposés aux épisodes de canicule en 2023 (42 jours de canicule contre 2 jours/an en moyenne avant 1989). 2 Français sur 3 (44 millions de personnes) sont exposés au risque d’inondation, et 35% aux risques de tempêtes et de cyclones. 

Les volontaires de la Croix-Rouge, présents sur le terrain, sont les premiers témoins de l’impact des crises climatiques sur la population : le temps moyen  de mobilisation pour une opération d'urgence a doublé en l’espace de 10 ans. Nos équipes interviennent plus souvent et plus longtemps pour faire face à des catastrophes climatiques de plus en plus fréquentes et intenses.  

Mais la population française est mal préparée à faire face aux conséquences de ces événements : seulement 40% des Français sont formés aux gestes et comportements qui sauvent, un taux qui reste l’un des plus faibles d’Europe. Les personnes vulnérables sont d’autant plus impactées. A titre d’exemple, 17% des seniors ne disposent pas de téléphone portable et ne peuvent par conséquent pas prendre connaissance des alertes en temps réel. 

L’accès généralisé à l’eau potable est devenu quant à lui un vrai défi en temps normal et pendant les crises : 1,4 million de personnes n’ont pas un accès décent à l’eau potable. Cette situation impacte en premier lieu les sans-abri, mais aussi une proportion non-négligeable de la population en Outre-mer, comme le rappelle le témoignage de Saïra Mohamadi Boussory, habitante de Mayotte : “Avant, l’eau était une ressource que l’on prenait pour acquise, aujourd’hui, elle est devenue un bien précieux et rare. Au plus fort de la crise, nous n’avions l’eau courante que 2 jours par semaine. Nous remplissions alors deux grands bidons de 170 litres, qui allaient être notre seule réserve.”

Les événements climatiques extrêmes agissent en effet comme un accélérateur de vulnérabilité pour les personnes déjà fragilisées: les personnes isolées, âgées, malades chroniques, sans abri ou mal logées en sont les premières victimes. Elles sont souvent moins bien informées sur les risques à venir et les comportements à adopter en cas de crise. 

Marjorie, sinistrée des inondations du Pas-de-Calais, en témoigne : "Cela fait plus de dix ans que nous vivons ici, et nous n’avions jamais été inondés. En quelques heures, notre sous-sol s’est rempli d’eau. Nous avons dû partir très vite, et tout laisser derrière nous. Pendant les inondations, nous avons eu beaucoup de mal à être informés au bon moment. Lors de la première inondation, le 8 novembre 2023, nous avons eu 60 cm d’eau dans notre sous-sol et nous n’avons pas reçu de message d’alerte. Ni entendu de sirène. Le 11 novembre, quand nous avons reçu le SMS FR-Alert, c’était déjà trop tard pour réagir, l’eau était déjà trop haute, elle était montée à 180 cm. Le message nous disait: “Vous êtes en zone inondable. Restez chez vous, fermez les portes, et faites le 18 si vous avez besoin.” Mais les pompiers nous ont plutôt conseillé de partir et d’aller nous abriter ailleurs. Ma voisine, elle, n’a jamais reçu les textos de FR-Alert. Mes voisins d’en face ont 72 ans, ils ne sont pas connectés à Internet et n’ont pas de réseaux sociaux. Or, c’est sur Facebook que le maire publiait toutes les infos importantes.”

Une population désireuse de s’engager et solidaire

Pour mobiliser le plus grand nombre de citoyens dans cette bataille, il faut d'abord être informé des risques des catastrophes climatiques et sensibilisé aux bons comportements à adopter en cas de crise. Une fois informés, il est crucial de proposer un cadre et des mesures concrètes pour agir.

La population française est particulièrement encline à s’engager et à venir en aide à ceux qui en ont besoin. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : sept personnes sur dix se disent prêtes à s’engager aux côtés des associations venant en aide aux sinistrés. Elles sont même neuf sur dix lorsqu'il s'agit d'apporter de l’aide à un voisin. L’esprit de solidarité est donc bien présent dans notre pays.

Le témoignage de Fabienne Berquier, Présidente de la délégation territoriale du Pas-de-Calais, le confirme : « Nos volontaires ont une énergie extraordinaire ! Lors des dernières inondations dans le Pas-de-Calais, certains sont venus de loin – de Savoie, de Nantes, de Colmar, du Doubs… – pour apporter leur soutien à nos équipes locales. Les secouristes se mêlent aux bénévoles de l’action sociale, tout le monde s’y met avec beaucoup d’entrain. Ensemble, nous avons une force incroyable à la Croix-Rouge ! »

Il est important de rappeler que ces événements climatiques extrêmes ne deviennent des catastrophes que si la population est insuffisamment préparée. Grâce aux analyses des chercheurs et aux retours d'expérience de ses équipes, la Croix-Rouge française a donc élaboré 10 propositions pour une meilleure préparation individuelle et collective :

● Former 80% de la population aux gestes et comportements qui sauvent (seulement 40% aujourd’hui est formée.)

● Inciter l’ensemble des citoyens à adopter le réflexe du sac d’urgence (seulement 10% des Français ont ce réflexe aujourd’hui). Le sac d’urgence doit répondre aux 5 besoins vitaux en cas de crise : hydratation, alimentation, soin, protection et signalement, pour une durée d’1 à 2 jours en cas d’arrivée tardive des secours. Venez découvrir notre sac d’urgence en détail.

● Impliquer les Français à l’occasion de la journée de mobilisation nationale “Tous résilients face aux risques” du 13 octobre, qui fédérera tous les acteurs, permettra de tester différents scenarios de crises et d’expliquer les bons comportements à adopter.

● Constituer un corps de volontaires formés aux urgences et mobilisables en cas de crise, ce qui appelle un cadre juridique incitatif à l’engagement et à la mise à disposition des bénévoles du secours par leur employeur.

● Favoriser l’engagement des Français à chaque étape de leur vie, avec une réelle reconnaissance de l’engagement associatif et citoyen par le système éducatif (ex : octroi de crédits universitaires) et le monde de l’entreprise (dons de RTT, mécénat, congés spécifiques pour les responsables d’association bénévoles…).

Consultez ici la liste complète de nos 10 propositions :

Philippe Da Costa, Président de la Croix-Rouge française, nous le rappelle : “Nous sommes victimes d’un mal que nous avons nous-mêmes engendré, et qui attise notre découragement. Pourtant, face à la crise, les volontaires de la Croix-Rouge démontrent depuis 160 ans que l’engagement nourrit l’espoir. Cette étude unique aspire donc à esquisser des solutions et à nous redonner prise sur le cours des choses à un moment où nous en avons tous grandement besoin.

Face à l'inévitable, la préparation est notre meilleure arme. Les nouvelles réalités climatiques s’imposent à nous. Une mobilisation des forces vives peut nous permettre de reprendre en main notre destin tout en protégeant les plus vulnérables d’entre nous. Il est temps de nous mettre en action pour un avenir plus résilient.

Illustrations : Anaïs Loué pour studio 1+1

Culture de l’engagement : un rempart aux catastrophes climatiques

Retrouvez l'article d'Usbek et Rica qui aborde notre rapport Résilience 2024 sous l'angle de l'engagement.

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Pour en savoir plus sur le sujet :

En savoir plus sur le rapport : Événements climatiques extrêmes

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