L’année 2024 marque le 75e anniversaire des quatre Conventions de Genève de 1949. Saisissons ce moment pour rappeler leur rôle essentiel dans la protection des personnes touchées par les conflits armés. Un moment crucial dans un monde polarisé où les conflits se multiplient dangereusement.

Depuis quelques années, nous assistons à un désenchantement croissant à l'égard des Conventions de Genève. Pourtant, les Conventions sont la pierre angulaire du droit international humanitaire (DIH)).Ses principes sont simples, partagés dans toutes les cultures et les religions. Le DIH est l’héritage collectif de toute l'humanité. Il est aussi pertinent aujourd’hui qu’hier mais il reste encore beaucoup à faire pour qu’il soit respecté.

Origine et finalités

1949. Le monde sort de l’horreur de la Seconde Guerre mondiale. Parce que la guerre doit être soumise à des règles pour limiter ses effets dévastateurs sur l'humanité, les Conventions de Genève sont  adoptées en 1949 . L’objectif est de protéger les personnes qui ne participent pas ou plus aux combats ; mais aussi de réglementer la conduite des conflits armés en limitant les moyens et méthodes de guerre utilisés afin de préserver une certaine humanité, de sauver des vies et de réduire les souffrances occasionnées. En un mot, les Conventions de Genève – et le DIH – protègent les droits de toutes les personnes touchées par un conflit armé et veillent à ce que chacun, même l'ennemi, soit perçu comme un être humain.

Des valeurs universellement partagées 

Le DIH est l'expression de valeurs humaines partagées dans toutes les cultures et les religions. Au cours de l'histoire, pratiquement toutes les guerres ont été soumises à un minimum de règles permettant de protéger les personnes vulnérables, comme les détenus, les enfants, les blessés ou les malades. Docteure en droit sénégalaise, chercheuse depuis les années 1970, Yolande Diallo est l’une des principales expertes en matière de traditions humanitaires africaines : “Les principes d’humanité, transmis oralement de génération en génération, sont largement pratiqués. Mais le lien avec le droit humanitaire est rarement fait. Quand deux enfants se disputaient ou en venaient aux mains, et qu’on les séparait, si l’un s’en allait, l’autre ne pouvait jamais le frapper dans le dos, parce que c’était une honte. La tradition est d’attaquer frontalement. Quelqu’un de désarmé ne peut donc pas être frappé, et c’est entré dans le comportement des gens.”

Les principes du DIH sont simples, universellement partagés et transcendent les traditions juridiques, les cultures et civilisations.

Le DIH a évolué au gré des nouvelles guerres

Parce que les conflits armés font désormais face à de  nouveaux défis, cyber-guerre, armes autonomes, intelligence artificielle, utilisation d'armes dans l'espace, le DIH s'adapte sans cesse aux nouvelles réalités de la guerre, à la transformation et au progrès des technologies et des tactiques militaires. Il ne fait en effet aucun doute que le DIH reste pertinent pour réglementer l'emploi de nouvelles armes pendant les conflits armés, au même titre qu'il réglemente déjà l'usage des armes existantes.

75 ans plus tard, le meilleur outil de protection et de paix

Dans un monde divisé, les règles du DIH sont plus que jamais d'actualité. Le DIH sauve des vies. Il a permis de libérer des milliers de personnes détenues au Yémen ainsi que les jeunes filles enlevées à Chibok au Nigéria. Il a permis d’évacuer des orphelins de Khartoum vers un endroit plus sûr. Il permet de rechercher des personnes disparues, de les retrouver et de les réunir. Il nous permet de faire circuler nos ambulances pour secourir les blessés…. Ces aspects rappellent avec force que le DIH est un bouclier au service de l’humanité, qu’il facilite le rétablissement de la paix et que la situation serait évidemment pire sans la protection qu'il confère. En réalité, le monde n'a pas d'outil plus efficace pour protéger les victimes des conflits armés. Mais si le droit n’est pas défaillant, c’est hélas la volonté de le faire appliquer qui peut faire défaut.

Le défi aujourd’hui et demain : assurer un réel respect des règles

Même si les Conventions de Genève sont universellement ratifiées, elles ne sont pas universellement respectées. Si les forces armées du monde entier continuent à interpréter le droit international humanitaire de manière erronée et incohérente, nous assisterons, impuissants, à la transformation de cet accord international conçu pour sauver des vies, en un outil juridique détourné de son objectif initial. 

Les États et les parties aux conflits doivent montrer l'exemple. Le respect du DIH est une question de volonté politique et nous appelons les États à instaurer une culture mondiale de respect du DIH. 

“Les Conventions de Genève sauvent des vies. Elles sont tout aussi pertinentes aujourd’hui qu’il y a 75 ans. Mais il faut une véritable volonté politique pour assurer leur mise en œuvre pleine et entière” nous a rappelé Mirjana Spoljaric, présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à l’occasion du 75e anniversaire des Conventions de Genève

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