Si le sud de l’île de Cebu a été épargné, le nord, en revanche, a été très affecté par le typhon Haiyan. En quelques heures de voiture, on passe d’une zone où la vie bat son plein à des paysages dévastés. Reportage de Laetitia Martin, déléguée de la Croix-Rouge française.

24 heures à peine après leur arrivée à Cebu, les équipiers Relief (distribution) des Croix-Rouge française, belge, américaine et philippine, accompagnés d’une équipe médicale de la Croix-Rouge japonaise et de la Fédération internationale de la Croix-Rouge (FICR) ont rejoint le nord de l’île pour évaluer les besoins sur deux zones particulièrement ravagées par le passage du typhon. Partir de Cebu city, où l’activité bat son plein, remonter vers le nord à travers des bourgades luxuriantes, où tout semble normal et, soudain, la fracture…

Des dégâts considérables

Si les routes ont été nettoyées et délestées des arbres et autres débris qui les jonchaient, les stigmates du passage d’Haiyan sont bel et bien là. Arbres arrachés, tas de taules et de bois qu’on devine originellement maisons, abris de fortune tendus sur ces vestiges font partie d’un paysage apocalyptique. Et pourtant, « La vie reprend, certains commerces ont rouvert, les sinistrés reçoivent eau et nourriture en suffisance. Ce dont on a vraiment besoin, c’est de solutions d’abri provisoire pour reloger les personnes », insiste le maire de Daanbantayan, Augusto Gorro. 

Dans cette agglomération de 20 arrondissements et de 86 000 habitants, on ne déplore aucun mort et seulement quelques dizaines de blessés légers. « Contrairement à Tacloban, nous n’avons pas été inondés, la mer n’est pas entrée dans les terres », explique le maire.  Mais les dégâts matériels sont importants. L’édile estime les dommages à 90 % des maisons. Il n’y pas d’électricité, hormis pour ceux qui sont équipés de générateurs. Le carburant commence à manquer également. L’approvisionnement en eau en est d’ailleurs affecté puisque seulement 2 des 9 stations de pompage de la ville fonctionnent. « Ce n’est pas si mal par rapport à d’autres localités », positive Augusto Gorro. Ici, la Croix-Rouge philippine a déjà distribué des kits alimentaires et de l’eau en bouteilles. D’autres associations et/ou entreprises interviennent en coordination avec la mairie et les chefs d’arrondissements. Les habitants de cette ville côtière vivent essentiellement de l’agriculture (notamment de la culture de la canne à sucre) et de la pêche. « Beaucoup de fermiers et pêcheurs ont perdu leur outil de travail et/ou leur production dans la catastrophe. »

Prévenir les risques sanitaires

A Bogo (voir la vidéo ci-contre), comme à Daanbantayan, les besoins primaires sont donc plutôt bien couverts (eau potable, nourriture). La mise à l’abri des sinistrés est devenue la priorité numéro un, d’autant que la saison des typhons n’est pas terminée… L’abri, mais aussi l’assainissement, puisque dans ces zones rurales, les sinistrés n’ont plus accès aux toilettes ou douches. Les besoins naturels sont désormais « jetés dans la forêt ou dans la mer », disent les habitants. Dans la plupart des arrondissements, l’eau domestique est puisée dans des sources ou puits dont la qualité n’est pas forcément vérifiée, et de nombreuses femmes disent avoir constaté des problèmes de diarrhées et infections respiratoires, notamment chez les enfants et personnes âgées.

Si les deux unités de santé primaire fonctionnent, l’une d’elle a été endommagée et les personnes en charge auraient bien besoin de ressources humaines supplémentaires, ce qui n’échappe pas au médecin de la Croix-Rouge japonaise : « La santé communautaire est un besoin et vu les conditions de vie des gens, il parait nécessaire de renforcer les structures existantes et de former les habitants aux soins de base afin de prévenir le développement d’épidémies. » Mais les Philippins gardent le sourire et positivent : « On est habitués, vous savez ! », nous dit en passant une femme croisée à Maya sur les ruines de sa maison.

La FICR et la Croix-Rouge philippine ont prévu de distribuer à nouveau denrées alimentaires, bâches en plastique, matelas et kits d’hygiène à Bogo, où la situation est similaire. Cinq cents familles recevront l’aide ce lundi 18 novembre. Daanbantayan devrait également bénéficier de l’aide peu après. Les équipes française, américaine et belge devraient quant à elle rejoindre d’autres îles, dont Leyte, où les besoins sont importants, et des zones restées jusqu’à présent inaccessibles.

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Laetitia Martin

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