La Croix-Rouge française en Algérie en 1954

Depuis 1945, une direction générale est instituée à Alger, dont dépendent trois conseils départementaux : Alger, Oran et Constantine. En 1954, ils animent une quarantaine de comités locaux et près de 13 000 adhérents, auxquels vont s’ajouter les 20 comités et leurs 4 000 adhérents dans les territoires du Sahara et des Oasis.

Le dispositif sanitaire et social

Dès les années 1920, la Croix-Rouge française dispose d’un important dispositif : hôpitaux, dispensaires, distributions alimentaires et vestimentaires, ouvroirs, etc. Une attention particulière est portée à la protection maternelle et infantile (maisons maternelles, crèches et pouponnières, aérium de Chréa, centre aéré Fréderic Lung à Alger, etc.), aux soins aux personnes âgées, aux personnes isolées, aux personnes en situation précaire en général. Les familles musulmanes, dont beaucoup sont illettrées, sont accompagnées dans leurs démarches administratives ou juridiques. Des camions-dispensaires, mis en service en 1948, fonctionnent tous les jours dans les bidonvilles de la périphérie d’Alger. Les actions sociales sont donc, sur le fond, les mêmes qu’en métropole. Elles revêtent cependant une importance plus grande. Même si elles se développent indifféremment en faveur des Européens et des « indigènes », 70 % des secours sont consacrés à la population musulmane. En effet, numériquement majoritaire, elle souffre d’une grande pauvreté, d’une scolarisation insuffisante, mais également des inégalités en termes de droits par rapport à la population européenne.

La Croix-Rouge française intervient également dans les situations d’urgence, lors des inondations, des sécheresses récurrentes, ou lors de séismes comme celui à Orléansville en 1954. La guerre, d’ailleurs, ne mettra pas fin à ces actions vitales.

Formation et secourisme

La Croix-Rouge française dispose par ailleurs d’écoles d’infirmières, d’assistantes sociales, de visiteuses médico-sociales, et d’une formation spécifique afin d’accéder plus facilement aux familles musulmanes. Les cours de secourisme, ateliers d’apprentissage et ouvroirs complètent le tableau. Ces lieux de formation représentent un véritable creuset des cultures présentes en Algérie, un lieu de mixité. En 1955, par exemple, les cours de secourisme du tout jeune comité de Tenès sont fréquentés par 41 hommes, dont 19 « Français musulmans », et 69 femmes, dont 33 musulmanes. Le centre de formation professionnelle de technique d’horlogerie d’Alger est ouvert à tous. Mais cet élan, bien que maintenu, sera globalement freiné par la situation qui s’aggrave.

Le secours aux militaires et aux anciens combattants

La Croix-Rouge française poursuit son rôle traditionnel d’aide aux soldats : visite aux hospitalisés, distributions aux soldats nécessiteux, organisation de foyers. Les comités sont particulièrement actifs en 1954. En effet, la fin de la guerre d’Indochine voit le rapatriement en Algérie de nombreux combattants, dont beaucoup sont Algériens. Ils vont venir s’ajouter aux anciens combattants musulmans qui fréquentent les Dar el Askri (Maisons du soldat) géré par chaque comité de la Croix-Rouge, seule particularité par rapport à la métropole. Ces foyers, réservés aux anciens combattants musulmans et à leur famille, disposent généralement d’un dispensaire, dont l’activité est très vite renforcée. Ils sont aussi un lieu de distribution de médicaments et de secours, alimentaires ou vestimentaires, d’aide aux familles au quotidien. Lors des distributions, il n’est pas rare d’y voir les bénéficiaires de l’aide médicale prêter main forte aux bénévoles. Si, durant la guerre, les dispensaires généraux sont moins fréquentés par les musulmans, probablement par peur des représailles, l’affluence sera toujours plus grande lors des consultations dans les Da el Askri.

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