Du 24 au 28 juillet, Philippe Da Costa s’est rendu en Moldavie et en Roumanie, où nous avons ouvert deux délégations. Nous nous engageons, à travers des accords de coopération sur cinq ans, à soutenir ces pays frontaliers de l’Ukraine, particulièrement impactés par le conflit. Objectif : aider les Croix-Rouge roumaine et moldave à faire face aux besoins actuels, mais aussi à mieux se préparer à de futures crises. C’est cela aussi le devoir de solidarité au sein du Mouvement.

Pourquoi s’implanter dans ces deux pays ? Quels sont leurs besoins ?

Pour comprendre les raisons de cette intensification de notre présence, il faut rappeler que nous, Croix-Rouge française, agissons à trois niveaux dans cette crise ukrainienne : en Ukraine même - à travers l’envoi de matériel humanitaire et de produits de première nécessité -, en France et dans les pays frontaliers. Notre engagement reste entier.

A ce jour, deux scénarios de crise sont possibles : soit la situation s’améliore dans les mois à venir, soit elle se prolonge et se détériore. La poussée russe dans le secteur d’Odessa, au sud de l’Ukraine, impacte déjà fortement la Moldavie et la Roumanie toutes proches. Ces pays accueillent aujourd’hui un très grand nombre de personnes fuyant l’Ukraine. Et cela risque de s’accentuer encore. La nécessité de soutenir ces pays est pour nous évidente. Elle l’est aussi pour notre Mouvement qui y renforce sa présence.

La Croix-Rouge française a des relations historiques avec les Croix-Rouge moldave et roumaine. Nous les avons, par le passé, soutenues dans le développement des premiers secours, notamment, et entretenons avec leur Croix-Rouge des liens d’amitié. En outre, nous avons en quelque sorte un devoir de solidarité envers les Croix-Rouge qui peuvent en avoir l’utilité. C’est ce qu’on appelle le renforcement des capacités et cela fait pleinement partie de notre mandat au sein du Mouvement international. Ces deux pays subissent de plein fouet les conséquences sociales, économiques et humanitaires du conflit en Ukraine alors qu’ils  souffrent déjà d’un taux de précarité très élevé. La Roumanie compte parmi les pays les plus pauvres d’Europe. Ce sont aussi des sociétés nationales fragiles en termes de ressources humaines et nous devons les aider à renforcer la coordination nationale de leurs actions face aux besoins.

Quelles actions allons-nous y déployer ?

Nous avons ouvert deux délégations Croix-Rouge française à Bucarest et à Chisinau pour être au plus proche des équipes sur place. Nous avons un double objectif : développer les premiers secours et renforcer les actions autour de la santé mentale et de la santé primaire. Sur ce dernier point, nous avons mené une mission d’évaluation durant deux mois afin d’avoir une vision très objective des besoins. Sur ces deux axes, nous avons une expertise reconnue. La présidente de la Croix-Rouge moldave, Larissa Birca, sait qu’elle peut, avec l’appui du Centre Mondial de Référence des Premiers Secours (cogéré par la Croix-Rouge française - ndlr) et notre soutien, développer à terme un département premiers secours d’excellence, et ainsi développer l’activité de ses branches, attirer de nouveaux volontaires, accroître sa visibilité et gagner une légitimité renforcée auprès du gouvernement moldave. Les premiers secours sont aussi, bien sûr, un formidable moyen de préparer la population aux crises, quelles qu’elles soient.

De son côté, la Croix-Rouge roumaine, plus solide, doit se préparer à une montée en puissance de ses actions si le conflit ukrainien s’enlise. Elle doit pouvoir répondre aux besoins des réfugiés ukrainiens, sans pour autant desservir la population qui souffre elle aussi de pauvreté, d’un manque d’accès aux soins. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes associés pour renforcer les activités de leur « caravane santé », un dispositif itinérant capable d’apporter un service médical de proximité à tous ceux qui en ont besoin.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) accompagnent eux aussi cette dynamique en déployant des formations aux premiers secours et en renforçant leur présence. La crise ukrainienne, en un sens, joue un rôle d’accélérateur dans le développement des Croix-Rouge moldave et roumaine.

Comment sont perçues nos actions à l’échelle de notre Mouvement ?

Notre présence en Moldavie et en Roumanie nous permet de disposer de deux « observatoires », en proximité de la ligne de front. Notre rôle est de répondre aux attentes de la Croix-Rouge ukrainienne, même si nous n’y sommes pas présents. Le fait d’être actifs dans les pays frontaliers nous permet de cerner leurs problématiques, de répondre au plus près à leurs besoins, de porter leur voix. Nous apprenons aussi leurs côtés.  

Je rappelle que nous sommes depuis quelques mois membres du conseil de direction de la FICR. Nous sommes donc un acteur de poids. Nous partageons une vision européenne de cette crise. Il est important pour nous d’assurer des échanges avec nos voisins et de coordonner l’action des sociétés nationales européennes. Un groupe Ukraine va d’ailleurs être constitué au sein du conseil de direction, auquel nous contribuerons activement.

De façon générale, nous transformons nos méthodes de travail au sein du Mouvement ; nous avons la volonté de renforcer notre coordination pour être plus forts et plus efficaces face aux crises à venir. Une chose est sûre, nous sortirons tous différents de cette crise ukrainienne.

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