Rencontre à la gare de Lviv avec Natalia et sa fille Arina, 6 ans, obligées de fuir Donetsk sous les bombes.

Historiquement, la gare de Lviv est la première construite dans l'Ukraine moderne, en 1861. Mais l'édifice actuel, qui possède de nombreuses pièces d'architecture art nouveau, n'a été construit qu'en 1904. C’est ici qu’arrivent les trains en provenance de l’est et du sud-est du pays, avec à leur bord, chaque jour, des dizaines, voire des centaines de personnes fuyant les bombardements.

Cet après-midi de novembre, il est presque 17 heures. Il commence déjà à faire froid en Ukraine quand le train s’arrête dans la gare, son terminus. Des familles entières en descendent. Ce qui frappe d’emblée, c’est l’absence d’hommes ou alors seulement la présence d’hommes âgés. Les plus jeunes sont restés sur place pour se battre ou protéger les maisons. Très rapidement, des équipes de bénévoles de la Croix-Rouge ukrainienne se dirigent vers elles. Elles leur précisent qu’aux abords du parvis de la gare, un espace a été installé pour les accueillir. Natalia et sa fille Arina, qui n’a que 6 ans, viennent d’effectuer vingt heures de voyage. Elles viennent de l’est du pays, de la région de Donetsk. « Nous sommes parties parce que les bombes s’abattaient sur nos maisons. Il y a trois jours, des obus sont tombés dans notre jardin. C’est absolument terrifiant, tout le monde s’en va. Car les ennemis sont désormais chez nous. Nous n’avons plus d’électricité dans la maison depuis trois mois. Désormais nous n’avons plus de gaz, rien pour nous chauffer, c’est impossible de rester. »

La mère et sa fille se positionnent dans la petite queue qui s’est constituée devant le bureau provisoire de la Croix-Rouge. Quelques tables, des chaises, une tente blanche. Ici ; les personnes sont enregistrées, obtiennent de l’aide, et reçoivent les sacs à dos fournis par la Croix-Rouge française. Elles sont parties de chez elles avec trois fois rien. « Nous n’avons pratiquement rien pu prendre. Toute l’aide qu’on peut nous apporter nous est très utile » confie Natalia. Elle reçoit des kits de la Croix-Rouge contenant de quoi se restaurer et boire, des produits d’hygiène, une couverture de survie... Où dormiront-elles ce soir ? Chez des amis. Le jour d’après, Natalia a prévu de partir avec sa fille en Pologne. Puis sans doute en France, où des connaissances lui ont dit de venir les rejoindre. « Mais j’espère revenir le plus vite possible. J’ai laissé mon mari et mon fils aîné à la maison. »

Alexandre Duyck

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