Le soutien en santé mentale : la clé pour lutter contre l’exclusion des personnes vivant avec le VIH
Publié le 9 octobre 2025

“Deux projets complémentaires consacrés au soutien psychosocial sont déployés à l’échelle du pays” comme nous explique Ibrahim ISSOUFOU IMADAN, responsable en soutien psychosocial à la Croix-Rouge française. Le premier s’adresse spécifiquement aux enfants et adolescents vivant avec le VIH, le second vise à renforcer la résilience de l’ensemble des personnes vivant avec le VIH. Ce second projet couvre les huit régions du pays, ainsi que la capitale Conakry, et s’articule autour de l’amélioration de l’adhésion au traitement, du renforcement du système de santé et de l’engagement communautaire.
Les activités mises en œuvre dans le cadre de ce projet reposent sur une approche pluridisciplinaire et multisectorielle. Sur le terrain, une équipe étendue, composée de chefs de projet, de superviseurs régionaux et d’accompagnateurs psychosociaux, assure la prise en charge psychosociale de 120 000 personnes sur plus de 80 sites. L’accompagnement se décline à la fois sous forme individuelle, à travers des séances d’éducation thérapeutique dès l’initiation au traitement, et sous forme de groupes de parole pour les patients nouvellement diagnostiqués ou retrouvés après une interruption du suivi. Des visites à domicile sont également organisées afin de maintenir le lien avec les patients en difficulté ou absents du système de soin. En parallèle, des temps d’analyse des pratiques professionnelles sont mis en place pour renforcer la qualité des interventions et soutenir nos volontaires, souvent confrontés à des situations de souffrance ou de vulnérabilité aiguë. Accepter la maladie, en parler, savoir accompagner les personnes vivant avec le VIH ainsi que leurs proches, ce sont autant d’actions indispensables pour lutter contre l’exclusion.
Un accompagnement renforcé pour les enfants et les adolescents trop souvent stigmatisés
L’accompagnement des enfants et adolescents fait l’objet d’une attention renforcée. Ces jeunes vivent souvent dans des contextes familiaux complexes, marqués par l’absence de parents biologiques. “Ils subissent des formes de discrimination intrafamiliale liées à leur statut sérologique. D’ailleurs, nombreux sont ceux qui ignorent leur statut jusqu’à un âge avancé, les parents redoutant les réactions de leur enfant ou craignant la stigmatisation” nous confie Ibrahim. Bien souvent rejetés par leurs camarades, ces enfants finissent par développer des problèmes comportementaux liés à un isolement forcé et non compris. Dans ce contexte, la Croix-Rouge guinéenne, avec l’appui de la Croix-Rouge française, a développé des outils adaptés, notamment des entretiens familiaux à visée thérapeutique, pour accompagner les familles dans le processus de révélation du statut et faciliter le dialogue sur des sujets encore tabous au sein de la société guinéenne.
Afin d’améliorer la compréhension de la maladie et de renforcer l’adhésion au traitement, des sessions de sensibilisation sont régulièrement proposées. Pour les plus jeunes, âgés de 7 à 12 ans, ces séances sont animées directement par les accompagnateurs psychosociaux. Pour les adolescents, la stratégie inclut une dimension participative innovante : de jeunes pairs éducateurs, eux-mêmes vivant avec le VIH, sont formés pour sensibiliser et soutenir leurs camarades sur les enjeux liés au traitement, à la stigmatisation et à la santé sexuelle. L’approche psychosociale développée ne se limite pas à un suivi médical. Elle comprend également des activités récréatives et sportives qui permettent aux enfants et adolescents de se retrouver dans des espaces bienveillants, de développer des liens sociaux et de renforcer leur sentiment d’appartenance à une communauté, ce qui a souvent fait défaut. À Conakry comme en région, des journées sont organisées autour de matchs de football, de jeux collectifs et d’activités ludiques dans des espaces spécialement aménagés. Ces moments de convivialité contribuent de manière significative au bien-être psychologique des jeunes. Reprendre part au collectif, c’est l’objectif recherché.
L’expérience menée en Guinée démontre combien l’intégration de la santé mentale dans les programmes consacrés au VIH est essentielle. En articulant soutien psychosocial, éducation thérapeutique, accompagnement familial et dynamique communautaire, nous contribuons à améliorer la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH, et à lutter contre la stigmatisation. La santé mentale n’est pas un volet secondaire, mais bien un pilier fondamental de la réponse à l’épidémie.