Cela fait deux mois qu’un séisme a frappé le nord de la Syrie. Une catastrophe qui ajoute des souffrances et de la misère à une population déjà meurtrie par douze années de guerre et une situation économique désastreuse. L’aide humanitaire est donc essentielle voire vitale pour les 300 000 personnes déplacées. Mais elle n’est pas simple à mettre en œuvre, comme nous le raconte Jérôme Vandenberg, chef de la délégation Croix-Rouge française Liban/Syrie.

Vous vous êtes rendu dans la ville d’Alep, dix jours seulement après le séisme. Qu’y avez-vous vu ?

J’ai beau avoir effectué des missions dans d’autres pays en guerre, je dois dire que c’est du jamais vu ! Il est impossible d’imaginer qu’Alep fut un jour la deuxième ville du pays. Des quartiers entiers sont en ruines. Les gens ont tout perdu et ne peuvent pas rentrer chez eux. Beaucoup d’immeubles encore debout menacent de s’effondrer à tout instant, d’autant qu’il y a eu de nombreuses secousses durant ces derniers mois. Les habitants vivent donc dans des centres d’hébergement collectifs. Des mosquées, des écoles et d’autres infrastructures ont été réquisitionnées pour les accueillir. L’objectif à présent est de rouvrir les écoles pour redonner aux enfants un semblant de normalité dans ce chaos. Leur état psychologique est évidemment terrible. Il y a cependant un esprit d’entraide important et des acteurs humanitaires très mobilisés aux côtés de la population.

Globalement, quels sont les besoins aujourd’hui et comment y répondons-nous ?

Ce séisme n’a fait qu’aggraver la situation et accroître les besoins de la population. Il faut savoir que plusieurs grandes villes sont détruites à 70 ou 80% dans le pays et que les structures de santé sont déjà très affaiblies en raison de la guerre.

De plus, la Syrie est un pays isolé sur le plan international et souffre d’une crise économique très sévère. Elle est donc en situation de forte dépendance humanitaire. Il y a peu d’électricité, pas d’eau courante, et donc un accès aux soins très limité.Dans les zones impactées par le tremblement de terre, 300 000 personnes ont été déplacées. Leurs besoins sont très primaires : eau potable, lait d’allaitement, vêtements, produits d'hygiène, nourriture et soins sont la priorité absolue. Ce sont des camions citernes qui assurent le ravitaillement en eau, tandis que les équipes mobiles médicales du Croissant-Rouge arabe syrien (SARC) effectuent des consultations et distribuent des médicaments. Ils gèrent également des centres de santé. Je suis impressionné par leur mobilisation depuis la première heure.

C’est de Beyrouth que vous coordonnez l’aide humanitaire pour la Syrie au niveau de la Croix-Rouge française. Comment ça se passe ?

Plusieurs grandes organisations humanitaires ont en effet un bureau à Beyrouth, parmi lesquelles les Nations unies, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Ce regroupement nous permet de travailler en synergie et de coordonner au mieux nos réponses aux besoins en lien avec le SARC qui est le principal acteur de terrain dans cette crise. Nous sommes également présents sur le terrain via notre coordinatrice des programmes qui rencontre régulièrement les volontaires sur place et nous remonte leurs priorités. L’accès à la région du Nord-Ouest est très limité car c’est une zone contrôlée par des groupes opposés au gouvernement. Nous intervenons en revanche dans le Nord en soutien des actions du CICR et du SARC.

Comment soutenons-nous nos partenaires dans cette crise ?

Même si nous ne pouvons pas assurer une présence continue sur le terrain, notre objectif est d’assurer un lien permanent et de renforcer le SARC via notre équipe en Syrie. Grâce à notre appel à don qui a suivi le séisme et aux fonds collectés, nous finançons une partie des actions menées par le CICR sur place. Nous avons également proposé d’autres actions de soutien au Croissant-Rouge arabe syrien dans les domaines de la santé et de l’assainissement en raison de notre expertise.

Sachant que cette crise ne sera pas résolue en quelques mois, nous sommes prêts à nous engager dans la durée aux côtés du SARC.

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