Départ de 50 volontaires pour Mayotte : « J’ai toujours cette envie d’aider les autres »
Publié le 23 décembre 2024
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A Lyon, Aline Georges, 31 ans, est responsable d’un pôle de gestion des projets dans une start-up. « Quand j’ai dit à mes collègues que je voulais partir à Mayotte avec la Croix-Rouge française, ils m’ont dit qu’il n’y avait aucun souci. C’est très important pour moi car c’est la première fois que je peux aider mon propre pays et je me sens vraiment concernée par ce drame. » Nous sommes samedi 21 décembre au terminal B de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle. Les passagers se bousculent pour embarquer, les vacances de Noël viennent de commencer. Mais pour Aline, pas de congés cette année mais une mission : aider la population de Mayotte frappée de plein fouet samedi 14 décembre par le cyclone Chido, qui a ravagé l’archipel français au cœur de l’océan Indien.
L’eau, une urgence vitale
Aline est là, au milieu de la cinquantaine d’autres volontaires prêts au départ. Dans son sac, en plus de tout le matériel adéquat pour une mission vers une terre où l’eau n’est plus potable, où les moustiques, porteurs de la dengue et du paludisme pullulent, elle a emporté des chocolats à partager avec les autres membres de l’équipe, un carnet « car j'écris beaucoup », une peluche qui la suit partout. « Au retour, j’aimerais bien me reposer au moins une nuit », confie-t-elle. Au sein des volontaires, la jeune femme occupe une fonction rare et essentielle dans ce type de catastrophe climatique et naturelle. Aline est équipière de réponse aux urgences (ERU) experte en eau, hygiène et assainissement. « Notre mission consiste surtout à évaluer les besoins de la population et améliorer la situation, notamment en matière de distribution d’eau potable. Nous ne venons pas pour distribuer des bouteilles en plastique, mais bien pour rendre l’eau sur place à nouveau potable. Ce qui permet de casser les vecteurs de contamination, les eaux stagnantes étant sources de maladie sur un terrain propice au choléra. Nous venons aussi pour former la population, pour aider les habitants à traiter l’eau et à mieux la stocker à domicile. Surtout, il ne faut pas arriver avec des idées préconçues mais avec des propositions de solutions en adéquation avec leur pratique et leurs connaissances. »
L’experte ajoute que l’eau c’est aussi l’hygiène. « C’est aussi rendre leur dignité aux gens.
Nous allons donc distribuer également des kits d’urgence hygiénique, du savon, du shampooing, le nécessaire pour l’hygiène menstruelle. On s’attend au pire, tout le monde a vu des images de la dévastation à la télévision. Mais ce sera peut-être encore pire. »
Cinq missions prioritaires
Notre ’aide auprès de la population meurtrie de Mayotte prend bien des visages. Restauration des systèmes rendant l’eau à nouveau potable ; déblaiement, reconstruction de raccordements ; soins médicaux, écoute… « L'ensemble des opérations va se dérouler sur au moins trois mois, détaille Florent Vallée, directeur de l’urgence et chef des opérations, présent à l’aéroport samedi 21 décembre tout comme le président national, Philippe Da Costa. On ne doit pas être une charge pour la population, nous serons autonomes en nourriture et en boisson. Nos volontaires ne passeront pas Noël en famille, c’est la preuve de leur altruisme. C’est un sacré défi que le leur ! »
A l’aéroport, le président national, Philippe Da Costa, rappelle les cinq priorités de la mission :
évaluation et distribution de produits de première nécessité ;
accès à l’eau et l’hygiène ;
soutien psychologique ;
rétablissement des liens familiaux ;
continuité des activités, en particulier en soins infirmiers et prévention.
« Je vous enjoins à aller au contact de la population, qui est encore en état de sidération, et à vous disperser sur l'ensemble du territoire mahorais », lance-t-il aux 50 volontaires avant de les remercier à nouveau. Et de leur préciser qu’une fois sur place, ils seront logés dans des bâtiments en dur, avec le confort spartiate certes, mais qui leur permettra de reprendre des forces le soir venu.
L’envie d’aider
Dans la foule, Audrey, Manon et Noémie, toutes trois étudiantes en Master assurent que leurs familles sont certes « un peu inquiètes pour nous mais surtout fières de savoir ce que nous allons faire sur place ». Jules, jeune infirmier de 22 ans, part lui aussi pour la première fois, qui plus est sur une mission aussi complexe, face à un événement d’une telle ampleur :
« J'ai toujours cette envie d’aider les autres, c’est pour cela que je me suis engagé auprès de la Croix-Rouge française. J’ai vu des images à la télévision et sur les médias de la catastrophe sur place, tout a l’air dévasté et je ne sais pas trop à quoi m’attendre, ça risque d’être vraiment terrible mais je suis très heureux de partir sur cette mission. J’espère pouvoir apporter le plus possible à ces populations qui ont tant souffert et tant besoin de notre aide et de notre solidarité. »
“J’irai là où on a besoin de moi”
Assises à même le sol en attendant l’embarquement, Rosine et Jacqueline croquent dans un sandwich. La première est psychologue, salariée de la Croix-Rouge. La seconde, âgée de 72 ans, est médecin réanimateur anesthésiste à la retraite.
Pour cette mission, en plus du matériel médical, elle emporte des nougats et un bonnet de Noël. Toutes deux vont être plus particulièrement en charge de la santé des cinquante volontaires.
Rosine, référent soutien psychologique, précise qu’elle ne sera pas en contact direct avec les populations mahoraises. « Parmi elles, on va rencontrer des chocs post- traumatiques liés à la catastrophe, à la perte, au deuil, à la disparition. Des réminiscences de l'évènement, des cauchemars, ou encore, chez les enfants des phénomènes de prostration, d’agitation. Je serai là pour donner des éléments de compréhension aux bénévoles, les aider à adopter la bonne attitude, à écouter en conservant la neutralité, la bonne distance sans être eux-mêmes trop affectés. » La psychologue saura aussi se rendre disponible pour écouter les volontaires et les aider à traverser cette épreuve. Quant à Jacqueline, qui n’en est pas à sa première mission à Mayotte, elle s’attend à soigner des bobos du quotidien mais aussi, à cause de l’eau, des maux de ventre, des diarrhées. « Il y aura des symptômes dûs aux changements de température et d’alimentation, sans doute de la fièvre, peut-être des syndromes liés au paludisme ou à la dengue. Je vais surtout les voir le matin et le soir mais la journée, j’irai là où on a besoin de moi au sein de la population, sans doute dans des dispensaires. » A la retraite depuis seulement trois ans, elle raconte s’être engagée au sein de la Croix-Rouge française tout naturellement. « J’avais peur de m’ennuyer et je ne voulais pas rester chez moi à ne rien faire. Je voulais encore me rendre utile. » Nul doute qu’elle le sera encore lors de cette mission.