Ukraine, 2018
Amiens, 2024

Anna

"Je suis heureuse que ma petite sœur soit en sécurité.

Ici, elle a cette possibilité de grandir sereinement sans voir la guerre. C'est la chose la plus importante pour moi."

Anna a 22 ans. Elle vivait auparavant à Dnipro, une grande ville située à deux cents kilomètres de Kharkiv, où elle suivait des études. Elle les poursuit aujourd’hui à Amiens. Mais elle espère bien rentrer un jour en Ukraine…

Avant la guerre, je vivais à Dnipro, une grande ville à deux cents kilomètres de Kharkiv. Je faisais des études  de génie civil et, en parallèle, de design à la Computer Academy. En France, j'ai été acceptée à l'Ecole Supérieure d'Art et de Design d'Amiens. J’avais déjà fait des démarches d’inscription auprès d’eux avant la guerre. Lorsque le conflit a éclaté, ils m’ont immédiatement écrit : « Venez, nous vous accepterons de toute façon ». A vrai dire, je n’étais pas encore prête à partir, j’espérais encore que la guerre allait s’arrêter. Quand les troupes russes sont entrées à Kharkiv, nous avons réalisé qu'il fallait quitter la zone. Je suis partie avec ma petite sœur et ma mère.

Amiens, 2024 © William Keo / Magnum Photos
Amiens, 2024 © William Keo / Magnum Photos

Jusque-là, j’étais une étudiante absolument insouciante. D’un coup, les évènements vous obligent à changer, à grandir. On comprend des choses plus profondes. On apprend à s’adapter très rapidement à de nouvelles situations. On se soucie de ses proches. Je suis heureuse que ma petite sœur soit en sécurité et qu’elle ait la possibilité de grandir sereinement sans voir la guerre. C'est la chose la plus importante pour moi.

Je vais terminer mes études d’ici un an et demi. Après, je ne sais pas encore ce que je ferai. Je pense qu’il serait intéressant d’aller voir comment on vit ailleurs. J'ai une spécialité qui me permettra de travailler n'importe où dans le monde. C’est un atout. Mais je suis sûre aussi qu'un jour, je retournerai en Ukraine. Ma famille et mes amis me manquent. Notre cuisine me manque aussi. En vivant exilée, j'ai réalisé que la notion de « foyer » ne tient pas seulement à une question de personnes, mais aussi de culture. Parfois, j’ai tout simplement envie que les gens autour de moi parlent la même langue que moi. Et puis,  j’ai la nostalgie de nos plats faits maison. Nous partagions des moments tellement chaleureux dans notre vie d’avant. Tout ce dont j’avais à me soucier, c’était de réussir mes examens.

Amiens, 2024 © William Keo / Magnum Photos
Amiens, 2024 © William Keo / Magnum Photos
Lviv, 2022 © Rafał Milach
Lviv, 2022 © Rafał Milach

L'objet

Lors de son exil, Anna a emporté une bague de fiançailles offerte par son amant. Pour elle, cette bague est la deuxième chose la plus importante à ses yeux, après les documents.

Amiens, 2024 © William Keo / Magnum Photos
Amiens, 2024 © William Keo / Magnum Photos

Découvrir d'autres histoires